Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Le blog de Alain Rajaonarivony
  • Contact

Profil

  • Alain Rajaonarivony

Recherche

20 décembre 2009 7 20 /12 /décembre /2009 01:53


Les Malgaches passeront des Fêtes inoubliables, leurs dirigeants s’y emploient, en tout cas, avec ferveur. Le Père Noël sera généreux : 2 gouvernements, 2 premier-ministres, un gros paquet de députés non élus (hormis ceux d’une mouvance), des élections surprises…

 

Andry Rajoelina s’est prêté à un débat le 16 décembre devant des journalistes dont la marge de manœuvre était limitée. Il y eut quand même des rires dans l’assistance quand il a parlé du pluralisme de la TVM (télévision nationale). Une date a été annoncée, -le  20 mars 2010-, celle des élections législatives. Ce fut l’information de la soirée. Le reste en découle.

 

Lettre au 1er ministre du DanemarkAuparavant, il est revenu sur un évènement qui l’a traumatisé et a pesé lourd sur ses décisions : le courrier de Copenhague (voir article : «Entre rires et honte, le désespoir»). Addis-Abeba était une victoire pour les légalistes, revenus dans le jeu et au plus haut niveau par l’intermédiaire de la co-présidence. Maputo III, mais surtout la volonté d’humilier Andry Rajoelina ( par cette controverse qui n’apporte rien au pays) resteront sûrement comme un grand regret pour les légalistes, du moins pour ceux qui ont assez de lucidité et de recul. En politique comme en mathématiques, il y a ce qu’on appelle des erreurs fatales.

 

La lettre envoyée par les hauts responsables politiques de 3 mouvances au Secrétaire général des Nations Unies et du Premier ministre du Danemark leur demandant de refuser la présence d’Andry Rajoelina au sommet climatique de Copenhague est de celles-là. Leurs auteurs n’en sont pas fiers, et dans son plaidoyer passionné depuis l’Afrique du Sud pour défendre Maputo III, le co-président Fetson Andrianirina s’est bien gardé d’en faire mention. Plus tard, au Carlton, le 18 décembre, il n’en a pas non plus pipé mot.

 

Ce n’était pas la distribution des ministères, sensée être l’objectif de la réunion, qui  a mis le feu aux poudres mais bien cette missive. Elle a atteint Andry Rajoelina au plus profond, suscitant en lui des résonances remontant à 2008. C’était l’époque où Marc Ravalomanana, à coups de décrets, vidait petit à petit sa fonction de Maire de toute sa substance. Et parallèlement à ce courrier, les politiciens présents à Maputo ont décidé, nonobstant les accords d’Addis-Abeba, de réduire les prérogatives du président désigné, pourtant déjà bien encadré par les 2 co-présidents. Il aurait eu l’obligation de faire cosigner tous ses actes et non plus seulement  les décisions du Conseil des ministres. De cela aussi, personne ne s’est vantée.

 

Le 15 décembre, un groupe d’officiers composés de 8 colonels et d’un capitaine de frégate ont demandé lors d’une conférence de presse au Carlton le retour des personnalités bloquées en Afrique. Le lendemain, les étudiants de l’Université d’Ankatso ont aussi exigé la même chose. Ils ont été exaucés car la levée de l’interdiction d’entrée du territoire a été signifiée par le Général de police, Organès Rakotomihantarizaka, dans la foulée. Les «provisoirement exilés» sont arrivés à Ivato dans l’après-midi du 18 décembre, chaleureusement accueillis par leurs partisans, venus en nombre. L’aéroport était sécurisé par les bérets rouges (les parachutistes), sous les ordres du commandant Roger Luc. On n’a donc pas vu les FIS (Forces d’intervention spéciale) venir comme à leur habitude intimider les légalistes. C’est aussi un signe que l’armée s’implique dans la crise. Désormais, les militaires mutins ne seront plus les seuls à être prêts à faire usage éventuellement de leurs armes.

 

Aussitôt arrivés, les responsables des 3 mouvances ont donné une conférence de presse au Carlton. Albert Zafy, très remonté, a traité Andry Rajoelina de «petit Hitler». «Pas un grand Hitler, un petit Hilter (en français) …puisque personne ne l’a élu» précise-t-il. Mamy Rakotoarivelo, le président du Congrès, a, quant à lui, annoncé une réunion préliminaire des députés de la transition pour le 22 décembre, leurs noms étant tous connus à l’exception de ceux de la mouvance Rajoelina. Il a demandé aux journalistes présents de les promouvoir auprès du public. Les institutions de la Transition seront mises en place, avec ou sans l’assentiment du pouvoir de fait.

 

Le retour des 3 mouvances aurait pu marquer la désescalade. Andry Rajoelina avait mentionné sa volonté de respecter la trêve de Noël. Officiellement, c’est d’ailleurs pour cette raison que la réunion du GIC (Groupe international de contact), prévue pour le 17 décembre à Antananarivo, a été reportée après les fêtes de fin d’année. Mais il n’en sera rien… Andry Rajoelina a révoqué Eugène Mangalaza, le premier-ministre de consensus le jour même où il a reposé le pied sur le sol national, pour le remplacer par Cécile Manorohanta, la vice premier-ministre en charge de l’Intérieur. Cette décision a été immédiatement condamnée par les autres parties.

 

Andry Rajoelina, lors de son intervention télévisée, a multiplié les gages et les promesses. Une commission électorale nationale indépendante devrait assurer la transparence du scrutin. Les temps d’antenne seront équitablement établis. La Transition servira simplement de facilitateur. Ce seront les futurs élus qui choisiront le Premier ministre. D’ici là, les membres du gouvernement expédieront les affaires courantes. Mais sa démarche, qui enterre les accords dûment signés, est condamnée par les autres protagonistes.

 

La future réunion du GIC accouchera sûrement d’un compromis. Sur le principe, aucun membre de la communauté internationale ne peut dénier que des élections sont la meilleure expression de la démocratie, pour peu qu’elles soient vraiment libres. D’où leur silence après cette déclaration. La France dans un communiqué, véritable exercice d’équilibre (ou d’équilibriste), a demandé des garanties de transparence, d'équité contrôlables par des observateurs internationaux et la reprise du dialogue, sans condamner.

 

C’est le souk total. La fin de l’année s’annonce très chaude. 2009 a été un cru exceptionnel pour les Malgaches. 2010 sera sans doute un millésime de la même veine.

 

Photo : une lettre inutile mais aux conséquences gravissimes.

 

 

Alain Rajaonarivony

 

 

 

Partager cet article
Repost0
15 décembre 2009 2 15 /12 /décembre /2009 12:50


Nous sommes aujourd’hui le 15 décembre 2009, la date-butoir pour Madagascar pour rendre un dossier cohérent auprès des autorités américaines afin de pouvoir continuer à bénéficier des conditions préférentielles de l’AGOA.

 

La réalité étant ce qu’elle est, on ne pourra pas attendre des politiciens malgaches, quelles que soient leurs tendances affichées, un geste fort allant dans le sens d’une réconciliation et d’un meilleur respect de l’autre, qui sont la base même d’une vie démocratique. Aucun d’entre eux n'a fait d’appel, à l’exception de Mr Roland Ratsiraka, ancien maire de Tamatave, qui a écrit au Président Obama pour lui demander de ne pas sanctionner Madagascar. Pétris d’arrogance et de suffisance, ils perçoivent à peine l’angoisse de ce peuple qu’ils prétendent servir et qui va perdre ses moyens de subsistance si leurs usines ferment. Ces petites gens se lèvent tôt, ne sont pas très bien payés, travaillent durement pour faire vivre leurs familles en fabricant des chemises ou des jeans exportés aux Etats-Unis et vont se retrouver au chômage. A Madagascar, il n’y a pas d’indemnités qui permettraient de tenir quelques mois sans travailler, ni de couverture maladie gratuite.

 

Beaucoup de citoyens ont attendu vainement une prise de position des dirigeants qui aurait permis de sauver la situation de Madagascar dans l’AGOA. Puisqu’aucun politicien n’a élevé la voix pour défendre les intérêts de ce petit peuple, trop occupés qu’ils sont à se positionner sur l’échiquier et à contrecarrer leurs adversaires, je le ferai donc, comme simple citoyen, à partir de ce modeste blog.

 

Les Etats-Unis ont un représentant dans la Grande Ile, je m’adresserai à lui car il est l’interface idéal, connaissant bien le pays et le dossier et, je pense, a de l’affection pour ce peuple. Il s’agit de Niels Marquardt.

 

Excellence, vous le savez, les Malgaches ont plein de défauts, j’en ai fait la liste sur ce blog, mais ils ont aussi une qualité qu’on ne peut leur enlever, c’est d’être profondément pacifiques. C’est justement pour cela qu’ils se retrouvent dans la situation actuelle. Ailleurs, il y aurait déjà des milliers de morts ou une révolution sanglante.

 

Parce que la population se défend pacifiquement, et que les dirigeants (ceux d’avant et de maintenant) utilisent la violence, verbale ou physique, vous en avez fait vous-même l’expérience, les forces sont inégales. C’est pourquoi, je vous supplie, Excellence, d’être l’avocat de ce peuple. Il serait profondément injuste de punir encore cette population qui n’aspire qu’à vivre simplement dans la dignité et se bat pour avoir un peu plus de liberté. La suspension de l’AGOA, ce sera des milliers de vies brisées, des enfants qui n’iront plus à l’école, des mères réduites à la prostitution pour survivre et des pères dont l’estime de soi se sera effondrée. Il ne s’agit plus là de rhétorique politique, mais de la vie. Le pire, c’est que certains politiciens y trouveront leurs comptes et ces milliers de chômeurs en plus, ce sera autant de manifestants qu’on pourra payer chichement pour soutenir leurs causes.

 

Excellence, vous connaissez assez Madagascar. Les menaces de sanctions ne sont pas perçues à leur juste mesure et tout le monde ne s’affolera que lorsqu’elles tomberont. D’ici là, c’est le «mora-mora». Ces sanctions seront contre-productives et détruiront des milliers de familles. Les dirigeants ne prendront conscience du désastre que lorsqu’eux-mêmes seront touchés dans leurs avantages et leur train de vie.

 

Le peuple malgache, qui comme vous le savez est profondément croyant et croit à la justice divine, saura que si les Etats-Unis n’appliquent pas les sanctions, c’est non qu’ils approuvent une autorité de fait qui doit encore consolider ses assises démocratiques, mais que leur amitié pour Madagascar leur a fait suivre une démarche privilégiant l’humain et l’avenir.

 

Excellence, intercédez pour ce peuple. Il y a si peu de voix qui le défende.

Vous remerciant de l’attention que vous avez bien voulu m’accorder, recevez l’assurance de ma haute considération.

 

 

P.S. : j’aurai voulu écrire ma lettre en anglais. Mais mon anglais est bien moins fluide que le français de Niels Marquardt. Il m’aurait fallu plus de temps. Et malheureusement, du temps, il n’y en a plus.

 

 

Alain Rajaonarivony



Partager cet article
Repost0
12 décembre 2009 6 12 /12 /décembre /2009 23:26


Hôtel Afrin à MaputoLe séjour à Maputo de politiciens malgaches dans cette ville qu’ils semblent apprécier (voir article précédent) s’est prolongé finalement bien au-delà de leurs prévisions. Devant rentrer le lundi 7 décembre, ils se sont accordés une journée de plus, histoire de fignoler une dernière lettre à adresser au Secrétaire Général des Nations Unies et au Premier-ministre du Danemark. Finalement, Andry Rajoelina leur a donné encore plus de rab en interdisant à l’avion d’Air Madagascar chargé de les ramener de décoller. Ils ont donc été pris en charge à l’hôtel Afrin par le pays hôte et la SADC. C’est un 5 étoiles, ils ont pu profiter de l’hospitalité mozambicaine et l’été austral est agréable. Ce samedi 12 décembre, ils ont tenté de prendre le vol régulier Johannesburg-Antananarivo sans plus de succès. Les autorités de fait de Madagascar semblent décidées à leur faire mieux connaître l’Afrique du Sud après le Mozambique.

 

Mais quelle idée aussi d’aller dénoncer le chef de l’état désigné, au titre de l’acte additionnel d’Addis-Abeba, en utilisant soi-même les titres de co-président, de président du Congrès ou du Conseil National de Réconciliation ? Autant il est légitime pour un collectif de citoyens, comme les GTT (légalistes) par exemple, de faire signer une pétition pour alerter l’opinion sur telle ou telle dérive de l’autorité, autant un homme d’état est tenu à un strict devoir de réserve. Accuser un président, alors qu’on est soi-même co-président ou haut responsable du même gouvernement, devant des dirigeants étrangers relève de la trahison. Ce n’est pas Andry Rajoelina qui est atteint mais la nation. On aura remarqué que seules les mouvances Zafy, par sa signature et celle de son co-président Emmanuel Rakotovahiny, et Ravalomanana, par le co-président Fetison Andrianirina et le président du Congrès Mamy Rakotoarivelo se sont impliquées officiellement dans cette démarche. L’objectif était d’empêcher la présence d’une délégation malgache conduite par Andry Rajoelina au sommet climatique de Copenhague.

 

La victime de cet acte «d’empêchement» a réagi très vigoureusement en bloquant le retour des contestataires au pays. Andry Rajoelina a surpris ses adversaires dont la mésaventure a fait rire la population. Si le ridicule tuait encore, il y aurait une hécatombe dans la classe politique. Depuis le début de cette crise, c’est-à-dire pratiquement un an maintenant, Marc Ravalomanana a toujours sous-estimé les capacités de réaction de son jeune challenger. Ce genre de faux-pas lui a déjà coûté cher et pourrait à terme lui être fatal.

 

La communauté internationale, par l’intermédiaire du GIC (Groupe de contact international) s’inquiète de toutes ces dérives et appelle à «s’abstenir de toute rhétorique ou intimidations provocatrices» dans un communiqué, le 11 décembre. L’Union africaine exprime sa profonde préoccupation devant le peu de progrès dans l’avancée du gouvernement d’union nationale.

 

Maputo III est à l’initiative du président mozambicain et de la SADC, convaincus par Marc Ravalomanana, et non du GIC comprenant les Nations Unies, l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), l’Union Africaine, l’Union Européenne, les Etats-Unis entre autres. Ses conclusions n’engagent donc pas la communauté internationale qui a demandé une réunion de «haut niveau». A priori, elle devrait se tenir le 17 décembre à Antananarivo. Le GIC s’implique pour éviter la mort des accords. Les décisions des 3 mouvances à Maputo ont entraîné une réaction d’Andry Rajoelina, tenté de nommer un Premier-ministre militaire.

 

DSCF9642.JPGLe jeu malsain et dangereux des politiciens risque d’isoler complètement Madagascar. Dans un sondage lancé par Sobika.com le 11 décembre qui a vu la participation de plus de 4000 internautes en deux jours, le dégout (39%) et la honte (45%) sont les sentiments qui prédominent. La population est profondément écoeurée de ses dirigeants, toutes tendances confondues. La désespérance est telle qu’on commence à entendre parler de soulèvement violent ou de grève générale. En ces jours de fêtes, les gens n’aspirent plus qu’à vivre normalement et veulent en finir, à tout prix ! Les Américains viennent de prévenir que si d’ici le 15 décembre, les entités de la nouvelle transition n’étaient pas mises en place, la participation de la Grande Ile à l’AGOA était compromise. Cela signifie des dizaines de milliers de chômeurs en plus.

 

Pendant que les Malgaches sont en train de s’humilier et de se détruire les uns les autres, sur le site pétrolier de Bemolanga, «on» travaille 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Pauvres Malgaches dans un pays si riche !

 

Photo1 : l’Hôtel Afrin, un 5 étoiles de prestige à Maputo.

Photo2 : Antananarivo veut tout simplement vivre. Manèges sur l’avenue de l’Indépendance.

 

Alain Rajaonarivony

 

 

 

Partager cet article
Repost0
6 décembre 2009 7 06 /12 /décembre /2009 10:34


Plusieurs responsables politiques de la Grande Ile sont de nouveau à Maputo, capitale du Mozambique, depuis le 3 décembre. Malgré la réticence de la communauté internationale, le président Ravalomanana a eu gain de cause et obtenu sa conférence. Initialement, les médiateurs avaient demandé que la dernière étape, la désignation des membres du gouvernement se passe entre Malgaches, avec la possibilité de régler les derniers points de friction par visioconférence avec les chefs de mouvances se trouvant à l’extérieur, Didier Ratsiraka à Paris et Marc Ravalomanana en Afrique du Sud. Joaquim Chissano, l’ancien chef des médiateurs, devait se rendre à Antananarivo pour le dernier coup de main.

 

Pour une fois, c’est Andry Rajoelina qui a suivi les recommandations du Groupe international de contact (GIC) -la visioconférence est une proposition d’Ablassé Ouedraogo- et c’est lui qui se retrouve seul à Antananarivo. Selon les articles 12 et 13 des accords, l’équipe de médiation n’existe plus. On est maintenant dans le suivi des relations institutionnelles qu’il faut normaliser. Mais ses atermoiements ont permis à son rival de monter au créneau. La gestion d’un pays n’est pas un spectacle permanent, avec des chèques symboliques, en format géant style Euromillions à distribuer à des employés dont la société est en difficulté (La Sirama à Nosy-be le 20 novembre, après l’unité de Brickaville quelques jours auparavant). Le président de la Transition a multiplié les déplacements en province. Il aurait dû accorder sa priorité à la formation du gouvernement, avec l’aide de son Premier ministre Eugène Mangalaza.

 

Dans le contexte actuel, des gestes forts comme la libération des prisonniers politiques ou la présentation d’une nouvelle équipe gouvernementale, même incomplète, auraient comblé d’aise la communauté internationale et permis de consolider les structures institutionnelles. En jouant la montre et les gros bras, via les officiers des FIS (Forces d’intervention spéciale) qui ont fait une déclaration depuis les bureaux de la présidence, il a miné son tout nouveau statut de chef d’état désigné. Des militaires n’ont pas à réclamer les ministères de souveraineté pour sa mouvance. D’ailleurs, logiquement, leur devoir de réserve aurait dû les astreindre au silence. Leur intervention reste dans la tradition du coup d’état. Il eût été plus judicieux que ce soit un juriste qui transmette ces revendications.

 

 Les légalistes se sentent le vent en poupe. Ils ne devraient pas se réjouir trop vite. Maputo III n’est qu’une étape car le forcing de Marc Ravalomanana, pour réapparaître au premier plan, en lieu et place de son co-président Fetison Andrianirina, va réactiver les extrémistes des deux bords et éloigner la perspective d’une transition plus ou moins paisible. «Foza*» (partisans convaincus du coup d’état) et «Fôpla**» (Tim arrivistes et sans scrupules) sont bien dans le même combat. Ces individus ne se sentent si bien que lorsque les déstabilisations leur offrent des opportunités d’ascension sociale inespérée, le dindon de la farce étant encore et toujours le peuple.

 

Maputo III est en rupture avec les rencontres précédentes, non seulement à cause de l’absence d’Andry Rajoelina, mais surtout parce que les observateurs internationaux sont réduits à leur plus simple expression : pas de représentants de l’OIF ou de bataillons de délégués… comme auparavant. Autant d’indices qui démontrent que c’est la réunion de trop. Les divisions politiques vont de nouveau se ressentir très durement, et les conditions de vie de la population continuer à se dégrader. C’est le prix à payer pour que certains continuent de tenir le haut de l’affiche. Les «forces du changement», hostiles aux accords, recommencent à élever la voix. Cette année 2009 aura été celle de la honte pour Madagascar et aussi bien Marc Ravalomanana qu’Andry Rajoelina y auront largement contribué.

 

Les accords de Maputo, avec l’acte additionnel d’Addis-Abeba, étaient un chef-d’œuvre de complexité alliant les méandres de l’esprit des Malgaches tout en respectant parfaitement les normes et le droit international. Il fallait passer par là pour arriver aux élections, sans effusion de sang, et lever rapidement l’embargo économique qui plonge la population dans une misère de plus en plus insupportable. Mais il manque le minimum de bonne volonté et l’amour de la patrie qui les auraient rendus applicables. Si les politiciens ne veulent pas de la conciliation, il leur restera l’option de la Guinée, où un autre putschiste, le capitaine Moussa Dadis Camara a été grièvement blessé à la tête par une rafale tirée par son propre aide de camp ce 3 décembre. Il a été évacué d’urgence au Maroc. Son directeur du protocole et plusieurs de ses gardes-de-corps n’ont pas eu cette chance. Ils ont été tués. Le 2 décembre, à son retour de Diego-Suarez, la voiture blindée d’Andry Rajoelina aurait été touchée par une balle. L’enquête n’a pas apporté de plus grandes précisions pour l’instant.

 

Ces accords, signés par toutes les parties, représentent ce qu’on peut faire de plus abouti intellectuellement. Mais quand chacun détourne sa signature et ses engagements, on tombe dans un problème d’ordre moral et spirituel. On peut reprendre la conclusion de Niry, l’éditorialiste de Sobika.com, il y a quelques jours : «A part Jésus Christ, on ne voit pas trop qui pourrait faire un miracle à Madagascar !». Si les Malgaches sont ce qu’ils prétendent être, un peuple croyant, c’est le moment de le montrer. Pour l’instant, ils ont surtout présenté beaucoup d’incohérences. Marc Ravalomanana faisait grand cas de ses convictions religieuses tout en tapant dans les caisses de l’état ou en corrompant des politiciens véreux pour changer la Constitution en sa faveur… L’aventure de Bill Clinton avec Monika Lewinsky, péché véniel au regard des drames défrayant l’actualité, a provoqué un scandale. Il a dû demander pardon publiquement à sa femme et au peuple américain. C’est peut-être une question de culture : voler l’Etat n’est pas voler, tromper sa femme n’est pas un pêché, violer la parole donnée non plus tout comme trahir ceux qui vous ont fait du bien.

 

Les dirigeants ne sont pas plus blâmables que la plupart de leurs compatriotes qui agissent de même et prennent ensuite la Sainte-Cène ou la Communion, en priant avec ferveur. C’est un peu la foi du mafioso qui va se confesser après chaque méfait. Beaucoup ont d’ailleurs trouvé des excuses au président après le massacre du 7 février. Andry Rajoelina, lui, était chaperonné par Monseigneur Odon Razanakolona, dit Monseigneur Omar depuis le coup d’état. Il terminait ses manifs, à l’époque pacifiques, par des séances de prières, et les Mpiandry (diacres) en toges blanches étaient toujours aux premières loges y compris lorsqu’il a pris le pouvoir. Cela ne l’a pas empêché de faire donner de la kalachnikov et de tuer des innocents. Quand au respect de la parole donnée, il est sur la même longueur d’ondes que son prédécesseur. Lui aussi n’a pas hésité à sacrifier (trahir serait plus exact) son «ami» Roindefo Monja pour sauver sa peau.  

 

Quand les Malgaches prendront au sérieux les paroles de ce Dieu qu’ils prétendent servir, ils auront peut-être des dirigeants différents. Pour l’instant, ceux qui les oppriment leur ressemblent. Le «paraître» est toujours privilégié au détriment de valeurs plus profondes et plus intérieures. Et ce n’est pas le dévouement admirable de quelques-uns qui pourront cacher la misère spirituelle de la majorité. A quoi sert 7,5% de croissance quand le SMIC demeure encore et toujours à 30 Euros ? Une infime minorité vit dans un luxe effarant et a vu son niveau de vie exploser. La paix sociale s’obtient par un minimum d’équité et de solidarité. «Le trône s’affermit par la justice» n’est pas un précepte tiré d’un cours de Sciences Po mais une citation du livre des Proverbes (16 :12) dans la Bible.

 

Un de mes vieux profs disait, il y a déjà bien longtemps : « La devise de la République française, Liberté, Egalité, Fraternité, c’est l’Evangile mais sans Dieu». Vaut-il mieux pour les Malgaches un Evangile sans Dieu ou un Dieu sans Evangile? République laïque, égalitaire et respectueuse des Droits de chacun ou pseudo-théocratie mais qui rejette les valeurs faisant la force de la foi? Les droits des plus humbles ne sont pas respectés. Les lois sont détournées par les puissants. Aucune législation sociale n’est appliquée et il n’y a jamais eu de véritable programme pour protéger les générations futures. Des gosses dorment dans les rues et fouillent les poubelles pour survivre. Le dénuement extrême des plus pauvres contrastent avec le luxe tapageur des nantis. L’adage, «on a les dirigeants qu’on mérite», semble trouver parfaitement son application.

 

* Foza : Ecrevisse, en référence à la révolution orange

** Fôpla : Faux-jetons (c'est un euphémisme), expression popularisée en 2002, pour désigner les arrivistes qui ont su manœuvrer pour s’accaparer des postes de responsabilité à la place des vrais militants.

 

Photo : La FIS, une réalisation de la HAT. Ses hommes sont responsables de l’humiliation et de la torture d’un pasteur-médiateur, de l’arrestation musclée d’un Premier-ministre de 71 ans, et du tabassage, à 5 contre 1, d’une sénatrice.

 

 

Alain Rajaonarivony

 

 

 

Partager cet article
Repost0
30 novembre 2009 1 30 /11 /novembre /2009 21:54


Ce n’est pas un épisode de la série «Kaamelott» où le roi Arthur a un mal de chien à garder un peu de solennité à la réunion de chefs aussi rustres que susceptibles. Non, cela se passe en vrai, en Lémurie, et plus précisément au Palais d’état d’Iavoloha. Le co-président Emmanuel Rakotovahiny est arrivé en retard, si tant est qu’il était au courant de l’heure exacte de la réunion, au Conseil des ministres présidé par Andry Rajoelina le 26 novembre. Un haut technocrate, spécialiste de la chose publique, commente, désabusé : «Dans tout pays civilisé, il y a un huissier qui annonce l’arrivée d’une personnalité lors d’un Conseil de ministres». «Il est arrivé sans prévenir… et nous reproche ensuite de n’être pas venu le saluer», se défend une ministre qui se trouvait aux premières loges. Le co-président a, en tout cas, poussé une «gueulante» sur le savoir-vivre en République et exigé des ministres le minimum de respect dû à son rang. Le Premier-ministre Eugène Mangalaza n’était pas là. Il n’avait pas voulu venir, l’autre co-président, Fetison Rakoto Andrianirina non plus. Ce dernier a expliqué ne pas vouloir répondre à une convocation «faite soudainement et unilatéralement par le Président de la Transition». Des ministres de l’ancienne équipe, qui auraient dû démissionner depuis longtemps,  se sont donc réunis sans le Premier-ministre de consensus nouvellement désigné.

 

La démarche préconisée par Mamy Andriamasomanana dans sa lettre ouverte (voir article précédent) pour débloquer la situation a retenu l’attention d’Andry Rajoelina qui devait en discuter avec Albert Zafy le 27 novembre. Au dernier moment, le président de la Transition s’est envolé pour Morondava.  La formation du nouveau gouvernement ne semble pas être la priorité absolue. La population continuera en attendant de souffrir. La levée de la quarantaine internationale est conditionnée à la mise en place effective de toutes les institutions prévues par les accords. Les sociétés exportatrices ferment les unes après les autres. La dernière à faire la Une est Prime View, une entreprise textile dont les clients se trouvent aux Etats-Unis. Ses 1500 employés sont au chômage technique depuis le 25 novembre, avant sans doute d’être licenciés définitivement. Mais comme la moitié des 150 usines du secteur travaillent pour le marché américain, ce n’est peut-être que les prémices d’une catastrophe annoncée. Dans le cadre de «l’African Growth and Opportunity Act» (AGOA), le dossier de la Grande Ile sera étudié par le gouvernement Obama à partir du 4 décembre. La non-reconduction de l’accès préférentiel mettra sur le carreau plusieurs dizaines de milliers de personnes. Les conséquences atteindront l’île voisine de Maurice dont les hommes d’affaires ont beaucoup investi dans les zones franches malgaches.

 

 Les anciens médiateurs sont très contents de prendre le large. Le cas malgache les a épuisés et ils désirent tourner la page. Ghassim Wane, chef de la nouvelle délégation de l’Union Africaine sur place, a réaffirmé que les Malgaches devaient trouver eux-mêmes la solution. Les insulaires veulent apparaître comme des politiciens respectables en faisant mine de se conformer aux accords mais en en violant l’esprit. Certains cherchent à contourner leurs signatures et les textes, dans la lignée de «l’extra-constitutionnel». Une telle mentalité à un tel niveau de concertation (patronnée par les Nations Unies) est assez inédite ! Les Malgaches ont beaucoup appris au monde !

 

Malgré les réticences de la communauté internationale, les autochtones tiennent absolument à leur petite balade à l’extérieur afin, disent-ils, de finir de monter le gouvernement (voir article : «les mouvances ne «mouvent» plus»). Comme l’idée émane du co-président Fetison Rakoto Andrianirina, à n’en pas douter, Marc Ravalomanana est derrière.  Sur 31 postes, une dizaine resterait à pourvoir. Les exigences d’une mouvance induisant des interactions avec celles des autres, les stratégies et les revendications s’adaptent et changent en permanence. Chacune a en ligne de mire les élections. Comme me l’a si bien expliqué un ministre rescapé pour l’instant de la HAT (Haute autorité de transition), en l’absence d’un nouveau gouvernement, la Communication est très importante dans ce cadre. Ce qui semble assez évident. Mais l’Agriculture l’est aussi, car «qui dit agriculture, dit 4x4 et une multitude de motos». Ces véhicules ne serviront donc pas uniquement à contrôler des pâturages. Cette bataille pour les ministères vise à s’accaparer des moyens de l’Etat pour les futures joutes électorales.

 

Comme Paris n’a pas été retenu, les Français étant eux-mêmes réticents, les têtes de file ont proposé Maputo. Les dates du 3 et 4 décembre avaient même été avancées pour la rencontre. Mais Andry Rajoelina, qui en avait accepté le principe au début, a déclaré à Morondava que les divergences devaient être réglées sur place. Ce 30 novembre, il a proposé que les entrevues se fassent en visioconférence. Et Joaquim Chissano devrait débarquer à Antananarivo cette semaine.

 

Les bailleurs de fonds sont très circonspects. Ce qu’ils voient actuellement les rend encore plus méfiants. L’embargo économique est toujours d’actualité. Maria Perez, chargée d’affaires de l’UE (Union Européenne) à Madagascar ne peut que déplorer la situation : «Les sanctions risquent de tomber» étant donné la «lenteur» dans la mise en place du nouveau gouvernement. Dans leur volonté de marquer des points, Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana sont les premiers responsables du blocage. Mais seul le peuple en subit les conséquences au quotidien de plus en plus durement.

 

 

Alain Rajaonarivony




Partager cet article
Repost0
25 novembre 2009 3 25 /11 /novembre /2009 17:39


André Rasolo

Ancien Ministre. Professeur de sociologie politique

Université d’Antananarivo

Mamy Andriamasomanana

Directeur territorial. Professeur agrégé

 

 

À l’attention de

Monsieur Andry Nirina Rajoelina

Chef de l’État. Président de la Transition

Monsieur Eugène Mangalaza

Premier Ministre. Chef du Gouvernement d’Union Nationale de la Transition 

 

Objet : « sortir des blocages » - lettre ouverte au Président et au Premier ministre

 

Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre,

 

Comme de nombreuses voix qualifiées qui s’élèvent et la majorité de la population qui vient à désespérer des blocages qui empêchent la constitution du Gouvernement d’Union Nationale de la Transition, nous avons voulu apporter quelques propositions que nous avons pris le soin d’asservir au travers de discussions et d’échanges avec

 

- des représentants locaux – non-officiellement mandatés - des mouvances politiques,

- des autorités politiques, civiles et militaires de la transition,

- des émissaires locaux – délégués intermittents ou permanents - de chancelleries locales et d’institutions internationales,

- d’anciens premier-ministres, ministres et chefs d’institutions,

- et surtout de deux des chefs de file des mouvances.


Parce que vous êtes, conjointement, les deux principales personnalités qui êtes qualifiées au regard des accords signés devant la communauté internationale et mandatées par ces accords - « Au nom du Peuple Malagasy » - nous vous interpellons respectueusement et solennellement pour exercer l’entièreté de vos prérogatives dans l’urgente constitution de ce gouvernement.


Pour ce faire, nous proposons une procédure simple, entièrement conforme, à la fois

- à la Charte de la Transition et aux quotas de répartition arrêtés par l’acte additionnel d’Addis-Abeba,

- au décret de nomination anticipée du Premier ministre.


Tout d’abord, nous nous permettons tout simplement de rappeler que conformément aux articles 4 et 5 de la Charte de la transition signée à Maputo : « Le Président de la transition qui exerce les fonctions de Chef de l’État […] Nomme et révoque, sur proposition du Premier Ministre, les membres du Gouvernement ».


Aussi, en respect à la hiérarchie des normes, rien ne peut s’opposer à ce que le Premier ministre vienne à proposer au Chef de l’État des noms correspondant à chaque portefeuille ministériel.


Il sera alors de la responsabilité du Président

- d’une part de confirmer ou d’infirmer les propositions avancées – en tenant compte des consultations prescrites par l’acte additionnel d’Addis-Abeba,

- d’autre part de s’astreindre à respecter les quotas de répartition définis par le même acte.


Toutefois, conscients des contingences politiques, nous avançons aussi les trois propositions complémentaires qui visent à réduire les pressions et les blocages qui ont, jusqu’alors, compromis la constitution du gouvernement d’Union nationale.


1. Le nombre de 31 portefeuilles ministériels a été arrêté, non seulement en correspondance avec les ministères actuels, mais aussi pour des motifs évidents de pertinence d’exécution et de préparation budgétaires : les engagements 2009 sont aujourd’hui exécutés et la préparation de la loi de finances 2010 s’est déjà faite sur la base des nomenclatures actuelles.


Aussi, sans céder à l’incantation de « l’intérêt supérieur de Nation », nous sommes convaincus que l’évident intérêt financier du pays, les problématiques d’organisation fonctionnelle (dont quelques soubresauts de contestations sont déjà apparus),ainsi que les contraintes de délais - qui s’imposent à ce gouvernement de la Transition, invitent tout simplement à ne modifier ni les appellations, ni les nomenclatures, ni les services rattachés à chaque portefeuille ministériel actuel.


2. Il est proposé de mettre un terme aux « marchandages » relatifs aux portefeuilles ministériels – y compris les ministères qualifiés de souveraineté.


Pour ce faire, les « mouvances » pourraient tout simplement proposer, au moins, autant de noms que de ministères à pourvoir – c’est-à-dire au moins un nom en face de chaque portefeuille ministériel (au moins 31 propositions de noms par mouvance, correspondant aux 31 ministères actuels).


Le Premier ministre dans ses prérogatives de propositions et le Chef de l’État dans son pouvoir de nomination et de révocation (et d’équilibre politique), pourront et sauront alors prendre leurs responsabilités !!!!


À titre indicatif, l’appartenance d’une personnalité à telle ou telle mouvance ne le qualifie et ne le disqualifie pas a priori pour un portefeuille ministériel, y compris de souveraineté…


3. En référence au décret de nomination du Premier ministre, si certaines des propositions correspondant aux nominations relatives à certains ministères, venaient continuer à poser de « réelles crises politiques », cela impliquerait que les ministres en exercice continuent à exercer leur mission conservatoire…


Cette situation induirait, à la fois, une réduction des surenchères de chaque mouvance, mais aussi une possibilité de renouveler les propositions sans préjudice à l’effectivité et la conduite de l’action gouvernementale : ceux qui voudront alors « bloquer » auront tout simplement choisi de conserver les ministres en exercice….


Parce que nous sommes conscients de la difficulté de vos tâches respectives ; parce que nous restons particulièrement attachés au respect de la dignité des fonctions que vous exercez, nous nous sommes permis, en tant que responsables politiques – qui avions été sollicités pour « candidater » au titre de telle ou telle mouvance dans ce futur gouvernement - mais surtout en tant qu’intellectuels de la chose publique, de vous soumettre ces quelques préconisations. Celles-ci, nous semble-t-il, diffèrent des déclarations comminatoires que d’aucuns se permettent d’enjoindre autant au Chef de l’État, qu’au Chef du Gouvernement que vous êtes respectivement.


Nous restons à votre entière disposition.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, l’assurance de notre plus haute et respectueuse considération.


 

André Rasolo                                                                Mamy Andriamasomanana



Partager cet article
Repost0
22 novembre 2009 7 22 /11 /novembre /2009 22:39


«Formation.gouv.mg…..Page actuellement en construction. Veuillez vous reconnecter ultérieurement»

 

C’est la page d’accueil sur laquelle les internautes en recherche désespérée des noms des nouveaux ministres malgaches auraient pu tomber. Mais ce site n’existe pas, tout comme le gouvernement. Depuis les accords du 6 novembre à Addis-Abeba, de deadline en deadline, le peuple attend sa mise en place. Le dernier report date du samedi 21 novembre. En deux semaines, les responsables politiques n’ont pas été capables de s’entendre et certains réclament de nouveau l’intervention de la communauté internationale.

 

S’il n’y avait pas eu autant de souffrances et de morts, la vie politique que l’on nous sert depuis un an tiendrait du grand guignol. Le professeur Zafy a d’ailleurs de nouveau avoué sa honte pour le pays. On peut comprendre pourquoi 50 ans d’indépendance n'ont généré que l'appauvrissement d'une grande majorité. La notion «d’intérêt supérieur de la nation» n’a pas le même sens dans la Grande Ile que dans le reste du monde. 

 

Quel est le problème insurmontable sur lequel achoppent les dirigeants ? Après s’être disputé sur le nombre de fauteuils à accorder à chacune des 4 mouvances signataires, sur le protocole et le bling-bling (voitures, bureaux, rang protocolaire), ils butent maintenant sur 2 ministères : celui de la justice et celui des Affaires étrangères.

 

Pour la Justice, tout le monde aura compris pourquoi : Les deux mouvances, celle d’Andry Rajoelina et de Marc Ravalomanana ont tout à craindre. Ce ne sont pas les affaires, y compris les crimes de sang qui manquent. Les partisans du coup d’état ressassent en boucle le 7 février mais les enquêtes pourraient s’étendre au reste. On peut citer de manière non exhaustive :

- Le «Black Monday», le 26 janvier, avec presque une centaine de morts dans une journée de «manifestations», qui a viré au pillage des entreprises du groupe Tiko dans toute l’île (voir article : «Un cauchemar dont il faut sortir»).

- Le 7 février, la tentative par la foule d’investir le Palais d’Etat d’Ambotsirohitra (ce n’était pas une simple manifestation) : 28 morts officiellement, mais une cinquantaine officieusement.

- Le 17 mars, coup d’état avec prise en otage de généraux et de négociateurs (pasteur Lala entre autres), menaces de diplomates…

- De mars à octobre, répressions des manifestations pacifiques ayant fait des morts (qu’on a cherché souvent à cacher) et des dizaines de blessés, des arrestations arbitraires, tortures et disparitions.

- Une pseudo-campagne de terrorisme, avec des bombinettes médiatisées, des innocents accusés, et des personnes tuées comme ces jeunes qui étaient sensés être les poseurs de bombes (aucune preuve), les 2 vigiles de Viva exécutés froidement par une vingtaine d’hommes en uniforme, agissant en opération, et armés d’AK47 et de lance-roquettes.(voir article : «La fuite en avant»). Le colonel de gendarmerie, promu depuis, en charge de l’enquête, n’a rien trouvé de mieux que d’accuser les membres du GTT (citoyens légalistes) qui manifestaient à Paris. Aucun militaire n’a été inquiété.

 

Concernant le MAE (ministère des Affaires étrangères), le problème est un peu différent. Andry Rajoelina est traumatisé par les épisodes de Bruxelles et des Nations-Unies (voir articles : «TGV Paris-Bruxelles» et «Humiliations au Sommet»). Il ne désire en aucun cas revivre ce genre de moments et ne veut laisser ce poste à la mouvance Ravalomanana. Cette dernière utilise ce ministère comme monnaie d’échange mais ne cherche pas à s’y accrocher à tout prix. Elle exige une personnalité neutre pour la justice, «un magistrat» suggère Mamy Rakotoarivelo, le nouveau président du Congrès (voir article précédent). Des techniciens neutres, donc hors mouvance, pour ces deux ministères feraient le bonheur de tout le monde. Un nom brûle toutes les lèvres pour le MAE. C’est celui du rédacteur des accords, y compris l’acte additionnel d’Addis-Abeba, Mamy Andriamasomanana. Mais chacun doit faire avec les extrémistes de son camp. Didier Ratsiraka ne verrait pas d’un mauvais œil l’arrivée de cette personnalité qu’il connaît. Le 20 novembre, dans un entretien par téléphone sur TVPlus, il confirmait que le blocage ne venait pas de lui. La rivalité paralysante se transpose aussi sur le terrain. Andry Rajoelina et le co-président Fetison Rakoto Andrianirina multiplient les tournées en province, chacun de son côté. Et cela, à défaut d’un voyage en commun à Rome pour le sommet de la FAO, annulé au dernier moment pour cause de dissensions protocolaires. Le Premier-ministre Eugène Mangalaza et ses appels au sens des responsabilités lancés dans le vide, se retrouve bien esseulé dans la capitale.

 

Las d’attendre sa libération conformément aux accords de Maputo et d’Addis-Abeba, Raharinaivo Andrianantoandro, ex-député et leader légaliste avait entamé une grève de la faim, il y a une semaine, pour attirer l’attention de l’opinion sur le sort des prisonniers politiques. Il a obtenu gain de cause vendredi 20 novembre sous la forme d’une liberté provisoire. Il continue néanmoins son action pour ses compagnons d’infortune au nombre de plusieurs dizaines, dont des femmes. Sans son courage, ce dossier qui aurait dû être traité en priorité pour rester dans l’esprit des accords, serait passé après la lutte pour les bureaux et les préséances de prestige.

 

On a commémoré ces jours-ci le vingtième anniversaire de la signature de la Convention internationale des droits de l'enfant adoptée par l'assemblée générale des Nations Unies le 20 novembre 1989. Dans les pays libres, les gouvernants ont fait le bilan de ce qui a été fait pour protéger les plus vulnérables et de ce qui restait à faire. Des journées de sensibilisations ont été organisées dans les écoles, des reportages diffusés à la télévision… A Madagascar, nous n’en sommes pas là. Des gosses fouillent les poubelles pour survivre mais les politiciens préfèrent laisser ce problème au père Pedro. C’est au point qu’un des seuls ministères n’ayant fait l’objet d’aucune bataille entre mouvances fut celui de la Population. Au moins Nadine Ramaroson peut envisager, sauf coup bas de dernière minute, de continuer ses actions en faveur de ses concitoyens délaissés. Elle aura été la seule ministre à avoir visité un hôpital psychiatrique ou un centre du troisième âge depuis bien longtemps. Le personnel soignant et les pensionnaires ont parfois été émus aux larmes en la voyant. «Les femmes et les enfants d’abord», encore une formule qui n’est pas en vogue à Madagascar…

 

Les accords de Maputo et d’Addis-Abeba voulaient renouer les fils du dialogue et parier sur la volonté des Malgaches de les exploiter pour sauver leur île. Les négociateurs n’ont sûrement pas anticipé tous les calculs d’épicier, croyant qu’ils avaient affaire à des gens intelligents, conscients de l’urgence et de la gravité de la situation. En fait, les politiciens n’ont rien à faire du peuple. Il aurait fallu des accords, balisés et contraignants à la virgule près pour ne plus laisser d’échappatoire. La moindre liberté d’interprétation est utilisée pour le pire. Finalement, seul Roindefo Monja a gardé un peu de dignité en partant la tête haute et en effectuant la passation à la Primature dans les règles. Le pays est à l’image de ses politiciens, au plus bas ! On en est maintenant à programmer une rencontre entre responsables de mouvances pour finaliser la formation du gouvernement. Le nom de Paris a été avancé car Didier Ratsiraka ne veut plus voyager. Il habite Neuilly. Sinon, on aurait pu suggérer New-York. Les chefs des «mouvances mouvantes» auraient été ainsi dans le bon contexte pour reprendre tous en chœur «I like to move it. Move it…»* et «bouger» enfin pour sortir leur patrie du gouffre…

 

* Refrain qui fait partie de la bande-son du dessin animé «Madagascar»


Photo 1 : Razily et son drapeau lors d'une manifestation violemment réprimée le 28 mars 2009

Photo 2 : des enfants dans la rue. L'avenir de la nouvelle génération n'est pas la priorité des politiciens malgaches

 

 

Alain Rajaonarivony

 

 

 

Partager cet article
Repost0
17 novembre 2009 2 17 /11 /novembre /2009 13:44


Mamy Rakotoarivelo, ancien vice-président de l’Assemblée nationale avait été choisi par la mouvance Ravalomanana à Addis-Abeba pour diriger le Congrès de la transition. Cette instance doit faire office de chambre basse, pendant les quelques mois de cohabitation préludant à la IVème République. Lors de la passation entre Jacques Sylla, ancien président de l’Assemblée, et lui-même, le 12 novembre, il a fait preuve d’un véritable esprit de conciliation et repris certains députés de son propre parti qui chahutaient son prédécesseur, qualifié de «traître». 

 

Les membres du Congrès qui représenteront le chef d’état sortant seront choisis parmi les anciens élus dont le mandat a été arbitrairement suspendu par la HAT (Haute autorité de transition) en mars, après le coup d’état. Ils sont au complet, contrairement aux autres mouvances, dont certains représentants ne savent pas encore s’ils seront ministres ou députés de la transition.

 

Mamy Rakotoarivelo se veut optimiste malgré tous les blocages actuels au niveau du gouvernement car, selon sa formule, «nous sommes tous co-responsables (les 4 mouvances)». Certains ministères sont particulièrement sensibles «car ils peuvent influencer directement sur le déroulement de la future campagne présidentielle» ajoute-t-il. Il s’agit notamment de la Justice, de la Défense nationale et de la Décentralisation. Pour le premier cité, «on pourrait envisager de mettre un magistrat qui serait une personnalité neutre». Il suit avec attention le dossier des prisonniers politiques.

 

Dès la formation du gouvernement consensuel et la mise en route des institutions de la nouvelle transition, «on pourrait envisager le retour du président Ravalomanana, conformément aux accords signés. Raisonnablement, on peut espérer ce retour pour janvier 2010». Venant de la bouche du nouveau responsable du Congrès, très proche de l’ancien président, on peut considérer que ce n‘est pas une simple supputation. Les événements risquent de s’accélérer.

 

Photo : Mamy Rakotoarivelo (au 1er plan) avec Marc Ravalomanana à Addis-Abeba le 6 Novembre (Sobika)

 

 

Alain Rajaonarivony

 

 

 

Partager cet article
Repost0
16 novembre 2009 1 16 /11 /novembre /2009 13:29


Roindefo Monja a bien fait les choses : fanfare, ambassadeurs et protocole. Ce 13 novembre, le rituel républicain qui entourait la passation avec son successeur Eugène Mangalaza aurait presque fait oublier que lui-même avait été nommé un certain 7 février sur la place du 13 mai. Monja s’est un peu racheté en forçant ses «amis» putschistes à abandonner leur tradition du viol de la Constitution et des lois de la république. Niels Marquardt, l’Ambassadeur américain en poste à Antananarivo ne s’y est pas trompé. Il était présent à la cérémonie, alors même que Monja l’avait pris à parti violemment il y a quelques mois, justement parce qu’il dénonçait ces manquements au respect des fondamentaux de l’état de droit. Le diplomate a fait part de sa satisfaction «d’être le témoin d’un pas très positif vers le rétablissement de l’ordre constitutionnel». «…La passation de pouvoir dans la paix entre les deux Premier-ministres montre la volonté politique d’apaiser la situation et d’aller de l’avant» ajoutera-t-il. C’est un satisfecit qui vaut son pesant d’or pour Roindefo Monja, réhabilité aux yeux de la communauté internationale. Car parmi les diplomates se trouvaient aussi les représentants de la Chine, de la Norvège ou de l’Afrique du Sud, des nations qui n’ont pas spécialement apprécié le coup d’état.

 

Son avenir politique est désormais plus ouvert et plus clairement tracé. Il peut se projeter dans l’après-transition en ayant réussi à se défaire en partie des casseroles du putsch. Son nouveau média, «24heures.mg», n’a pas hésité à titrer sur l’ingérence française et la Françafrique. Il prend ainsi à contre-pied son «ex-ami» Andry Rajoelina et ses sponsors. Ce dernier, qui a été récupéré à Addis-Abeba pour permettre enfin une sortie de crise, continue à batailler sur des questions de protocole avec ses co-présidents. C’est le grand n’importe-quoi et un combat d’arrière-garde. Son sort risque d’être définitivement scellé dans quelques mois mais sûrement pas en devenant un président élu. Il serait plus intelligent pour lui de profiter de ce court laps de temps  pour tenter de laisser une trace plus positive dans l’histoire.

 

Le co-président Fetison Rakoto Andrianirina, a reçu l’Ambassadeur de Chine, Wo Ruidi, dans sa suite au Carlton le 12 novembre. Il doit donner ses audiences à l’hôtel puisqu’il ne dispose pas d’un bureau, tout comme son collègue, l’autre co-président, Emmanuel Rakotovahiny, depuis la signature des accords d’Addis-Abeba le 6 novembre. Il est clair que les ex-putschistes cherchent à humilier les co-présidents en ne leur accordant pas le moindre égard. Le diplomate chinois a fait part de la disponibilité de son pays à octroyer une aide pouvant atteindre 4 milliards de dollars à Madagascar.

 

Juste au retour d’Andry Rajoelina d’Addis-Abeba, où on lui a offert le rang protocolaire de chef d’état, mais sans les pouvoirs de ce dernier, l’Ambassadeur français s’est précipité au palais d’Iavoloha le 10 novembre pour présenter ses lettres de créance. Il était temps ! Depuis le 19 mars, date de son arrivée dans la Grande Ile, il s'exprime et s’implique, prenant ainsi des libertés avec les usages diplomatiques, qui demandent la réserve tant que ces lettres n’ont pas été remises. On peut comprendre qu’il ne voulait pas laisser la part belle à son homologue américain et tenait à être plus «qu’un chef d’escale d’Air France» (le mot étant de Nicolas Sarkozy, pour les récriminations, prière de s’adresser à son auteur). Mais que faisait le drapeau malgache sur son véhicule? Normalement, c’est un privilège réservé aux visites d’état. Il témoigne en tout cas de la haute estime dans lequel il est tenu par les ex-putschistes.

 

Andry Rajoelina et Fetison Rakoto Andrianirina devraient représenter la Grande Ile au sommet mondial de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) qui se tient à Rome du 16 au 18 novembre. Une note de l’Ambassade malgache en Italie provoque depuis quelques jours l’ire et les délires des partisans du coup d’état : «…chefs de délégations : conjointement M. Andry Rajoelina et Fetison Rakoto Andrianirina, respectivement Président et Co-président de la Transition (institutionnellement, ces deux personnalités doivent être traitées et considérées à égalité)…».

 

Raharinaivo Andrianantoandro, ex-député, porte-parole du TIM et leader légaliste, en prison depuis le 15 septembre et hospitalisé à la suite de la dégradation alarmante de sa santé, a entamé une grève de la faim depuis le dimanche 15 novembre. Les prisonniers politiques n’ont toujours pas été libérés malgré les engagements d’Addis-Abeba. C’est un sujet grave, non seulement pour les victimes, mais aussi pour la société qui attendait une prise de responsabilité des gouvernants. Mais apparemment, ils sont encore accaparés par les histoires de protocoles. A chacun ses soucis !

 

 

Alain Rajaonarivony




Partager cet article
Repost0
8 novembre 2009 7 08 /11 /novembre /2009 15:26


C’était très mal parti. L’ancien président Ravalomanana dès son arrivée le 1er novembre dans la capitale éthiopienne, avait tancé vertement Ablassé Ouedraogo, «simple consultant de l’Union Africaine» pour ses propos concernant les réunions du 6 octobre au Carlton. Outrepassant son devoir de réserve, Ouedraogo avait émis publiquement l’idée que la présidence de la nouvelle transition était acquise à Andry Rajoelina, même sans la signature des 4 responsables des mouvances engagées dans les négociations quadripartites. Il voulait sans doute appuyer la position française, exprimée par Alain Joyandet, secrétaire d’état à la coopération : Andry Rajoelina est le président de la transition, reconnu par la communauté internationale. Du moins, c’était le vœu le plus cher de l’Hexagone.

 

Ravalomanana a changé d’hôtel pour ne plus dépendre de l’organisation de l’Union africaine et demandé aux autorités éthiopiennes d’assurer sa sécurité. «La responsabilité des uns et des autres, devant l'Histoire, est pleinement engagée, et aucune considération particulière, aussi légitime fût-elle, ne saurait valoir devant la primauté indiscutable de l'intérêt général» déclarera Jean Ping, le président de la commission de l’Union africaine lors de son discours d’ouverture. Il mentionnera la «lassitude quasi-générale» de la population, ressentie aussi par les médiateurs. 

 

Comme à Maputo II, les discussions se sont immédiatement focalisées sur la présidence de la nouvelle transition. Andry Rajoelina considérait qu'elle lui était acquise depuis Maputo I et le Carlton. Marc Ravalomanana, lui,  persistait dans son refus : il ne voulait pas d’un putschiste à la tête de cette entité. Les 3 jours de négociations sont ainsi passés. Le 5 novembre à minuit, le temps officiel imparti était épuisé mais les Malgaches continuaient de discuter. Alors qu’on entamait la journée du 6, vers 1heure et quart du matin, Andry Rajoelina provoque un incident diplomatique. «Je pars, je pars !  S'ils ne veulent pas de ma présidence, je pars. Mais ils en seront les responsables» clame-t-il en sortant de la salle avec sa suite.

 

Consternation des autres participants, à commencer par Joaquim Chissano. Choqué, ce dernier déclare : «Ce n’est à vous de partir car je suis le président de séance…C’est moi qui doit partir si je ne sers plus à rien, pas vous». Il sera retenu par Tiébilé Dramé et Edem Kodjo alors que la délégation de la HAT (Haute autorité de transition) quitte la réunion au pas de course Le vieux professeur Zafy, doyen des présidents malagasy, a du mal à cacher son indignation : «Diriger un pays, ce n’est pas comme ça…C’est un tort énorme, énorme, ca lui coûtera très cher… Il est le plus jeune, il ne respecte pas les vieux. Il y a quand même le respect de l’âge… Son comportement… n’est pas très malgache…Ce qu’il a fait aujourd’hui, c’est une honte pour les Malgaches. C’est une honte pour quelqu’un qui prétend diriger le pays…Il n’a quand même pas dix ans».

 

Dans la matinée, Didier Ratsiraka, qui avait fêté ses 73 ans la veille, présentera ses excuses à Joaquim Chissano au nom de ses compatriotes. Andry Rajoelina reviendra finalement en début d’après-midi. Ce psychodrame accouchera d’une solution logique et qui était dans les cartons depuis bien longtemps au cas où : une présidence collégiale où toutes les mouvances seraient représentées. Seule celle de Didier Ratsiraka en est absente car elle hérite de la primature où Eugène Mangalaza est confirmé. Tout le monde participe ainsi à l’exécutif et chacun sauve la face. 

 

Font donc partie de la direction présidentielle collégiale :

- le Docteur Emmanuel Rakotovahiny, présenté par le professeur Albert Zafy, qui passe du statut de vice-président, prévu le 6 octobre au Carlton, à celui de co-président,

- Fetison Rakoto Andrianirina, le représentant de Marc Ravalomanana, lui aussi co-président

- et le plus jeune, Andry Rajoelina, qui sauvegarde son «acquis» en préservant une légère prééminence protocolaire sur ses deux collègues mais sans pouvoir supplémentaire.

 

La France le 7 novembre, par la voix de Bernard Kouchner, son ministre des Affaires étrangères, «salue la conclusion positive… des négociations inter-malgaches». Elle peut ! Sa représentante à Addis-Abeba, Béatrice Lederlé, s’est dépensée sans compter. Andry Rajoelina s’en est finalement sorti mais très affaibli. Aucune décision ne pourra désormais être prise au sommet de l’état sans la signature des 3 co-présidents. Marc Ravalomanana s’est réjoui du fait qu’Andry Rajoelina ne soit plus «le chef». En plus de la primature, Didier Ratsiraka obtient les Finances en échange de 2 ministères moins stratégiques.   

 

En marge des négociations s’est déroulée une autre bataille, plus anecdotique. Les 2 courants du GTT (Gasy Tia Tanindrazana), légalistes, ont chacun envoyé une délégation à Addis-Abeba. Le «GTT international» était représenté par l’emblématique jeune avocate Vony Rambolamanana et un autre militant. La branche dissidente, le «Collectif GTT» a mandaté 4 personnes. L’enjeu était la reconnaissance du «former président» Marc Ravalomanana. La lutte a tourné à l’avantage du «GTT international».

 

Le maintien d’Andry Rajoelina ne peut faire illusion. La HAT, déjà moribonde, termine son aventure par un échec total dans tous les domaines : une économie détruite, des libertés bafouées et une corruption encore plus visible que sous le régime précédent. Le scandale du bois de rose, qui a coûté 120 millions de dollars au pays n’en est qu’un exemple. Pour avoir plus détails sur cette affaire, on peut se référer à un excellent article d’Achille sur son blog (Reflexiums, en lien). La nouvelle transition s’attèlera sans doute à une remise aux normes républicaines des pratiques de l’état. On ne devrait plus voir les membres de la FIS (Force d’intervention spéciale) faire des descentes pour aller arrêter, tabasser ou menacer des citoyens pour la simple raison que leurs idées ne leur reviennent pas.

 

La Grande Ile dispose maintenant de 3 présidents non élus à sa tête mais on s’abstiendra de ricaner (bien que… !). Cette solution apparaît comme la moins mauvaise, en permettant l’apaisement et en ouvrant au peuple la possibilité de s’exprimer enfin par des élections avant fin 2010. Le compte à rebours a d’ors et déjà commencé. On peut raisonnablement espérer que la fin de l’embargo économique par la communauté internationale, ramènera un minimum d’embellie dans le domaine des emplois. Ce sera un peu de soleil pour une population exsangue qui se bat depuis des décennies pour le respect de ses libertés.

 

Alain Rajaonarivony

 

 

 

Partager cet article
Repost0