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29 décembre 2020 2 29 /12 /décembre /2020 16:39

 

Photo 1 : L'Hôtel de ville de Tours et les voies du tramway qui sillonne l'agglomération

 

Début août 2020, notre fils Mikael passe quelques jours à la maison. Le second tour des élections municipales vient d’avoir lieu le 28 juin, juste après le premier confinement dû au Covid 19. Christophe Bouchet, le Maire de Tours, dont il est le chef de cabinet (« chief of staff » comme diraient les Tiko boys d’antan, férus d’anglicisme) vient d’être défait par les Ecologistes. Avec 66% d’abstention à Tours, et 58,4% dans toute la France, « du jamais-vu » comme l’écrit Le Monde, ce fut une élection singulière. Avec le recul, on s’apercevra que c’est toute l’année 2020 qui fût bizarre.

 

Toujours est-il que Mikael se retrouve « libre» en juillet, avec toute l’équipe municipale dirigeante, et peut venir nous voir. Il aurait bien voulu profiter de ce temps, nous dit-il, pour faire le chemin de Compostelle, mais ne veut pas démarrer seul. Mon épouse et moi, qui avions bien pensé à ce périple plus jeunes, lui proposons alors de partir avec lui pour la première partie du chemin. Ainsi fût décidé ! Quand nous irons acheter notre équipement à Décathlon en expliquant notre projet, la jeune vendeuse nous demandera de quel entraînement nous disposons. A la réponse de ma femme, « aucun, à part quelques marches », elle s’arrêtera interloquée. A son regard, je compris qu’on était des « vieux inconscients », voire des allumés.

 

Le 10 Août, au petit matin, nous sommes devant la Basilique Saint-Martin de Tours, attendant l’ouverture, avec chacun notre sac de 10 kilos sur le dos. La sœur s’occupant des pèlerins ne tarde pas trop, signe nos credencials (carnets de route du pèlerin) et nous donne une bénédiction pour la route.

 

Photo 2 : Une partie de mon credential, avec comme premier tampon celui de la Basilique Saint-Martin de Tours. Le pélérin a l'obligation de le tamponner à chaque étape pour valider son pélèrinage. 

 

Les 27 kilomètres du premier jour sont durs et le sac tire sur le dos. Je n’ai pas encore trouvé la bonne position pour le porter. Les jours suivants, ce sera la canicule et nous nous retrouverons, transpirants, sur les chemins au milieu des champs et des bois, loin de toute agglomération. A peine parfois saluons-nous un paysan sur son tracteur dans son champ. Marchant en regardant le sol sous mon chapeau, je vois les fourmis traverser le chemin de terre. Je me rends alors compte de l’arrogance de l’être humain et de sa petitesse. Nous croyons être maîtres de notre destin mais à l’échelle de la planète, nous ne sommes que des fourmis. Quand nous sommes lâchés dans la nature, à la merci des éléments, tout-à-coup, nous prenons conscience de notre vraie dimension. Il fait très chaud, nous sommes passablement fatigués mais il faut continuer pour arriver au gîte car nous sommes au milieu de nulle part, peu ou pas de point d’eau.

 

Photo 3 : Après une journée de marche, le soleil commence à descendre à l'horizon (photo prise par Marie-Lucie)

 

De temps en temps, nous croisons la ligne du TGV Paris-Bordeaux, soit par un tunnel en-dessous des rails, soit par un pont au-dessus. Je discerne que nous sommes vraiment dans deux mondes différents. Nous faisons entre 25 et 30 kilomètres par jour en moyenne, sous le soleil ou sous la pluie. Le TGV file à 200 kms/h, avec des pointes à 300. Peut-être les passagers nous aperçoivent-ils fugitivement, pendant quelques secondes. Assis dans leurs fauteuils, peuvent-ils imaginer que la soif nous tenaille parfois ou que nos pieds commencent à souffrir, les ampoules et les blessures ayant fait leur apparition? Je songe alors à Madagascar. Car marcher pendant des heures et des jours donne le temps de réfléchir sauf quand la fatigue vous taraude sur la fin de l’étape et que vous n’avez plus qu’une seule pensée, arriver.

 

Photo 4 : Le TGV Paris-Tours-Bordeaux croise assez souvent le chemin de Compostelle.

 

A Madagascar aussi, il y a un TGV célèbre. Ce n’est pas un train rapide et moderne, mais un parti politique au pouvoir. Seul le nom est commun, et pourtant, pour les Malagasy, un train serait également bien utile et contribuerait à relancer l’économie.

Un projet de réseau ferré comme le TGV s’étale sur plusieurs mandats de président. Il demande  une vision nette de l’amélioration de la vie des générations futures et un vrai sens de l’intérêt supérieur de la nation. Il faut donc une continuité des grands chantiers qu’un chef d’état commencerait et qu’un autre finirait. Je ne crois pas qu’à Madagascar, les politiciens, à quelques exceptions près, soient capables de se projeter aussi loin et de passer outre leurs egos. Mais je ne demande qu’à me tromper. Jusqu’à présent, celui qui arrive au pouvoir détruit l’œuvre de son prédécesseur. Seul l’enrichissement est rapide pour ce sérail et beaucoup de politiciens se recyclent d’un parti à l’autre suivant les opportunités. 4X4, jets privés ou hélicos, on est loin de la souffrance du peuple qui marche pour survivre.  Ce sont deux mondes différents. A part Dadabe Tsiranana, aucun ne s’est préoccupé du rail, tellement indispensable à la population, surtout celle qui est enclavée. Et il y a des télescopages d’images dévastateurs comme des députés dans un cocktail pendant que les enfants meurent du Kere (famine) dans le Sud.

 

Photo 5 : Il y a pratiquement toujours une Croix à la croisée des chemins. La coquille Saint-Jacques est le symbole de la route de Compostelle.

 

Où sont les valeurs morales dans tout cela, en particulier chrétiennes, puisque nous sommes sur le chemin de Compostelle?

 

Madagascar a des capacités d’investissement limité qui devraient être réservées à des projets amenant un bien-être au plus grand nombre, et sur un long terme. Un maillage du pays en nouvelles voies ferrées en fait partie.

 

 

A suivre

 

Alain Rajaonarivony

 

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