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  • Alain Rajaonarivony

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3 février 2009 2 03 /02 /février /2009 00:45


Le forcing d’Andry Rajoelina sur la place du 13 mai le samedi 31 janvier a eu l’effet d’un électrochoc… sur la diaspora. Jusqu’à présent, elle suivait d’un œil intéressé mais distant les soubresauts du pays, échaudée sans doute par les déceptions de 2002.

 

Ce qui ressort des centaines de posts et commentaires, c’est qu’une forte proportion des Malagasy de l’extérieur avait consciemment ou inconsciemment à l’esprit un scénario idéal. Ravalomanana restait à sa place tout en arrêtant de faire n’importe quoi et en revenant aux idéaux de départ : liberté, justice sociale, développement réellement conçu pour la population. On comptait sur le jeune et tenace Andry Rajoelina pour l’y inciter.

 

Les deux hommes disposant d’une forte personnalité, le Président aurait joué le rôle d’un « raiamandreny » (l’ancien empreint de sagesse) et son cadet se serait occupé du gouvernement. Ils se seraient neutralisés l’un l’autre et les citoyens auront pu enfin respirer, car chacun se serait disputé leurs faveurs.

 

Hélas, le petit peuple n’a pas les bonnes manières, celles qui plaisent à la communauté internationale et aux intellectuels. Car on en sait un peu plus sur ce qui s’est passé il y a quatre jours. C’est la base du mouvement qui a poussé le Maire à cette décision, exactement comme elle avait contraint Ravalomanana  à faire sa première «proclamation de la victoire» en février 2002 sur la même place. Les mêmes causes produisent les mêmes effets. Trop de frustrations accumulées demandent des réponses immédiates.

 

En tout cas, les positions se radicalisent, à la grande joie des boutes-feux, parmi lesquels figurent des TIM désespérément accrochés à leurs fauteuils et quelques exilés amusés sans doute de voir leur rival de 2002 dans la situation inconfortable qu’eux-mêmes vivaient à l’époque.

 

On prête au gouvernement l’intention de changer le Maire par un PDS dans des délais très brefs.

 

De leur côté, les protestataires ont déposé une requête de déchéance du Président de la République auprès de la Haute Cour Constitutionnelle.

 

La contestation après un léger flottement va reprendre de plus belle. Les syndicats de la Jirama (société de l’eau et de l’électricité) et des représentants des administrateurs civils se sont entretenus avec Andry Rajoelina le 2 février.

 

Les possibilités de négociations « s’éloignent à grands pas », pour reprendre les mots de RFI (Radio France Internationale)

 

Les tours opérateurs ont autorisé sans surcoût un report de séjour pour les clients qui le souhaitent sur la destination Madagascar. Cependant, les compagnies conservent pour l’instant les vols prévus ces prochains jours.  Les ressortissants européens ont en main le plan d’évacuation qui sera coordonné par les Français en cas de nécessité. Antananarivo est quadrillé en secteurs, et Alarobia se trouve par exemple dans le secteur 8.

 

Pour les membres des familles de la diaspora restés au pays, il n’y aura pas d’avion prévu pour fuir si ça tourne mal. Comme dans « Hôtel Rwanda », les Noirs qui n'ont pas de double passeport restent au bas de la passerelle.

 

C’est peut-être le moment de lancer des bonnes idées pour sortir de là. Si l’un(e) ou l’autre d’entre vous en a une géniale ou originale, je lui laisserai volontiers la possibilité de l’exposer.

 

Le concept de « développement rapide et durable », malheureusement dévoyé, provenait par exemple de la diaspora. D’autres inspirations aussi fortes ne sont pas impossibles. Rendons à César ce qui est à César. La promesse « d’une 4L pour chaque famille » vient bien du Président.

 

 

Alain Rajaonarivony

 

 


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1 février 2009 7 01 /02 /février /2009 21:18


Si le fait de devoir arrêter la dérive autoritariste du Président Ravalomanana ne souffre pas de discussion, Andry Rajoelina devait-il pour autant passer par la phase « auto-proclamation » sur la place du 13 Mai ? Le débat est lancé.


Solofo Rafenombolatiana, un de mes compagnons de lutte en 2002, n’a pas pu retenir son émotion après cet événement et a monté un blog pour participer à une réflexion  qui laisse de moins en moins indifférente la diaspora.



Et maintenant qu'allons nous faire?


Après mon cri de coeur, voici le moment des propositions et avertissements pour sortir de là par le haut, non pas pour les protagonistes mais surtout pour le pays et uniquement pour le pays.

D'aucuns diront que c'est du "il n'y a qu'à faut qu'on ..." mais qu'importe, j'apporte ma brique à cet échafaudage, ce ne sont que des idées et elles sont critiquables, amendables voire refusables.

Je ne vais pas revenir sur les 'failles et maux' de l'administration actuelle ni ses 'réussites et biens faits' (oui, que cela plaisent à certains ou non, il y en a eu) mais sur l'impact pour le pays d'un coup d'état.

Madagascar est certes une île mais au 21-ième siècle et à l'heure de la mondialisation, elle ne vit pas seule.
Mondialisation veut dire : les capitaux, les biens et les gens se déplacent comme ils le veulent (un peu moins vrai pour les gens mais passons...).
Tous les pays du monde sont en concurrence pour capter des capitaux et des compétences pour leurs développements. Et cette concurrence sera acharnée en ce temps de crise financière et économique mondiale.

Si nous voulons développer ce pays, nous devons maintenir et continuer à développer notre capital confiance vis-à-vis de ceux qui ont des capitaux et compétences, et de nos jeunes.

Là j'entends déjà les critiques disant "nous n'avons pas besoin des capitaux des prédateurs étrangers", comme en bons insulaires qui se respectent; mais ne vous méprenez pas, les capitaux des malagasy (de Madagascar et d'ailleurs) aussi risquent d'aller sous d'autres cieux où la stabilité politique leurs assurent un meilleur Retour sur Investissement.
Idem pour nos jeunes qui seront découragés de voir qu'il n'y aura pas d'avenir pour eux sur place comme durant la période 80-90.

Mon unique point:
Respectez notre constitution, les échéances électorales et surtout les lois que nous avons votées.
Instruisez une motion de censure à l'assemblée pour changer de gouvernement, si vous avez la majorité, mais en aucun cas pour destituer un Président élu, vous n'aurez pas le droit.

De toutes les façons, le meilleur signal que nous puissions envoyer au reste du monde (donc aux possesseurs de capitaux, malagasy ou non) est un règlement pacifique de cette crise avec un gouvernement de cohabitation sous la conduite du Président élu.

En dernier lieu, Antananarivo est la capitale de Madagascar certes mais elle n'est pas Madagascar tout entier. Les Tananariviens ne représentent pas toute l'île et encore moins les 85% de paysans qui ont globalement bénéficié des réalisations de l'administration actuelle, parole d'un Tananarivien!

 

Solofo Rafenombolatiana

 

Le blog de Solofo :

http://maudigascar.blogspot.com/

 

 

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1 février 2009 7 01 /02 /février /2009 00:38



Ce samedi 31 janvier, il était encore tôt quand les chaises et la sonorisation furent installées devant l’hôtel de ville en reconstruction. Vers 9h15, d’après les témoignages, des hommes cagoulés arrivent à bord de 3 véhicules militaires pour, semble-t-il, s’en prendre au matériel. Devant la détermination de la foule encore clairsemée à cette heure matinale, et après quelques jets de pierres de la part de jeunes, ils ont dû battre en retraite et se dégager en lançant une grenade lacrymogène. Un quart d’heure après, c’est un convoi plus imposant composé de camions remplis de soldats qui pénètre sur l’avenue de l’Indépendance en direction de la place du 13 mai. Les manifestants ne se laissent pas impressionner et les sifflets fusent. La seconde tentative se solde comme la première par une déroute.


Le Président avait limogé le responsable de l’état-major mixte opérationnel (Emmo/nat) le 29 janvier et nommé un autre général à sa place. Rien n’y a fait. Les « ordres fermes » ne sont plus suivis d’effets depuis des semaines. Les officiers restent cohérents dans leurs attitudes, ce qui semble indiquer un malaise profond face à la volonté du chef suprême de juguler le mouvement de contestation par la répression. « Tester d’abord votre force avant de vous mesurer à moi ! » avait déclaré le chef de l’Etat, menaçant. C’est fait !


Au moment où Andry Rajoelina monte à la tribune entouré de gardes de corps aux aguets, le doigt sur la détente de la kalachnikov, ils seront plusieurs dizaines de milliers de tananariviens à l’acclamer. Devant la tribune sont massés les journalistes dont plusieurs correspondants de médias internationaux. 


Le Maire de la Capitale dénoncera les dérives anticonstitutionnelles du Chef de l’Etat, les qualifiant de haute trahison. Il annoncera ensuite qu’il va assumer la direction d’une autorité de transition « puisque le Président et le gouvernement n’ont pas pris leurs responsabilités ». Il demandera à la Banque Centrale de ne plus permettre de retrait d’argent et aux ministères de rester fermés lundi. Pour respecter les formes légales, une demande de destitution sera déposée devant le Parlement, ajoutera-t-il, sous les ovations.


Les négociations entre le chef de l’Etat et le premier responsable d’Antananarivo auraient dû démarrer le 30 janvier, c'est-à-dire la veille de cette manifestation. Les ambassadeurs accrédités et le FFKM (Fédération des Eglises) faisant office de médiateurs, ont sollicité un report que le jeune Maire a accepté. Ce renvoi, sans doute à la demande de la Présidence, aura été une occasion manquée de plus. Pourquoi, dans un contexte aussi dramatique tergiverser pour entamer une discussion d’une importance cruciale ?


Toujours est-il que le Président a pris son nouvel avion pour aller faire le tour des villes de province hier. Des jets de pierres sur son cortège à Tamatave, quelques applaudissements polis ailleurs, on ne peut pas dire que c’était une tournée triomphale malgré la propagande qui se donne beaucoup de mal, en particulier sur Internet. Il se murmure surtout que les émissaires du pouvoir auraient aussi visité les succursales de la Banque centrale, ce qui aurait motivé la demande du Maire de faire bloquer tout retrait d’argent.   


La foule s’est dispersée dans l’après-midi, sans incidents, en l’absence de tout policier ou gendarme. Ceci tend à prouver qu’il n’y a pas d’amalgame à faire entre manifestants et casseurs. La seule réaction de Marc Ravalomanana devant la presse fut de déclarer « qu’il est le seul Président » et que la justice allait s’occuper de son rival.


Le président de la Commission de l'Union Africaine (UA) Jean Ping a déclaré le soir même que "tout changement anticonstitutionnel à Madagascar sera condamné". Cette organisation se rappelle ainsi au bon souvenir des Malagasy. En 2002, elle était intervenue en faveur de Didier Ratsiraka. Cette fois-ci, la déclaration est plus modérée. "Si l'accession se fait par des voies constitutionnelles, rien à dire, mais si elle se fait de manière inconstitutionnelle, la réaction sera la même que d'habitude, la condamnation". Il est vrai qu’en Afrique, les formes importent souvent plus que le fond.


Les choses se sont donc précipitées. Le jeu malsain du chef de l’Etat, annonçant alternativement répressions puis négociations, tout en reculant ces dernières à chaque fois, a fini par exaspérer ses opposants. On ne joue pas avec la vie de la nation. Madagascar plonge dans une période d’incertitudes. Ravalomanana porte une lourde responsabilité car il a réduit au fur et à mesure la possibilité d’une cohabitation. A Andry Rajoelina de prouver maintenant qu’imposer cette autorité de transition était la meilleure solution. Il doit très vite dévoiler ses plans que le peuple jugera sur pièces.



Alain Rajaonarivony




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30 janvier 2009 5 30 /01 /janvier /2009 13:14



Après un blocage de la situation désespérant, alors que le nombre de victimes s’accroissait régulièrement, tout s’est brutalement emballé. Tour à tour, en fin d’après-midi hier, le Président Marc Ravalomanana et le Maire Andry Rajaoelina ont annoncé qu’ils étaient prêts à engager des négociations pour sortir le pays de la crise. Sur TV5, le Maire a apporté quelques précisions. Il a laissé entendre qu’il serait prêt à prendre la tête d’un gouvernement de transition, bref, à occuper le poste de Premier ministre.

 

Le FFKM (Fédération des Eglises), absent de la scène depuis plusieurs semaines a contribué au rapprochement des deux parties. Toute la journée d’hier, la plateforme de l’opposition (Leader Fanilo, Arema, Avi…) plus le FCD (Force pour le Changement Démocratique) étaient en réunion. Le fruit de leurs cogitations  a été exposé au FFKM et aux ambassadeurs accrédités dans la Grande Ile pays aujourd’hui au Carlton. Sans surprise, ils soutiennent Andry Rajoelina dans sa démarche.

 

De ce grand remue-méninges, seul le TIM (parti présidentiel) était absent. Alors qu’elle est sensée être la plus grande formation politique du pays, la conjoncture dramatique du moment a révélé que ce n’était qu’une coquille vide. Parachutages, copinages et corruption ne sont pas de bons ingrédients pour donner des militants motivés. Les retournements de veste risquent d’être nombreux dans les semaines qui viennent.

 

La réussite de l’opération « ville morte » d’hier, 29 janvier, place le Maire en position de force dans les futures discussions. Il dispose d’une réelle popularité qu’il pourra faire valoir. En même temps, il a l’obligation de ne pas décevoir et les attentes sont immenses après sept ans de frustrations. Car l’arrivée de Andry Rajoelina à ce niveau n’est que la suite logique de la volonté farouche de la population à changer son destin. Les Malagasy estiment qu’ils ne méritent pas de vivre ad vitam aeternam pauvres dans un pays riche.

 

Ravalomanana est arrivé au pouvoir en 2002 par la rue. Refugié dans sa maison de Faravohitra, dans la Haute ville, il était protégé par le « fokonolona » (association de citoyens) qui avait érigé des barrages avec des bacs à ordures, des poutres et des pavés. Son rival, soutenu par des puissances étrangères, bénéficiait d’éléments bien mieux armés. La lutte a duré 6 mois avant que le Président actuel ne soit enfin reconnu par la communauté internationale. Tant de privations et de sacrifices n’ont finalement apporté au peuple qu’amertume et humiliations. Le chef de l’Etat fit preuve d’une totale désinvolture, s’attribuant tous les mérites de la victoire. Il préféra s’entourer d’arrivistes lui devant tout, qu’il pouvait manipuler à sa guise, plutôt que de faire appel aux militants et aux intellectuels auxquels il était redevable. Juste avant que ne commence la révolte populaire, il ne parlait plus que de jet privé, conférences internationales et hôtel cinq étoiles. Manifestement, il n’appartenait plus au même monde que la grande masse qui l’a poussé sur le trône.

 

Andry Rajoelina ne disposera d’aucune période de grâce, parce qu’elle a été entièrement épuisée par le Président. La composition de son équipe gouvernementale devra impérativement refléter cette aspiration au renouveau. Les combinaisons politiciennes avec des « has been » sur le retour sont à proscrire.

 

Logiquement, Madagascar aura  bientôt à sa tête un Président imposé par la rue en 2002 et un Premier Ministre adoubé de la même façon en 2009. Parmi les documents de base utilisés par les deux hommes dans leurs futures tractations figure le manifeste qui a été publié sur ce blog le 28 janvier (voir article « Appel des intellectuels malagasy »).

 

Seule la démocratie directe a finalement démontré son efficacité dans ce pays. Sénat et Assemblée ont brillé par leur totale inutilité. Au contraire, la célérité des parlementaires à accéder à tous les désirs de l’exécutif, y compris les amendements les plus liberticides, a contribué à amplifier la crise. Les Malagasy devraient réfléchir sur un modèle spécifique de gouvernance, qui garantisse à chaque citoyen la liberté et empêche toute velléité d’accaparement des pouvoirs et des richesses par une minorité.

 

 

Photo : Solofo Tinah Heriniaina (avec mes remerciements)

Alain Rajaonarivony

 


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29 janvier 2009 4 29 /01 /janvier /2009 12:08




Madagascar fait la Une des journaux à ses dépens. « Le Monde » rapporte les propos du secrétaire d’Etat à la Coopération et à la Francophonie Alain Joyandet : "Il y a maintenant plus de 80 morts en quelques jours, donc la situation est très préoccupante…" Le gouvernement français se prépare à toutes les éventualités pour protéger ses ressortissants, y compris leur rapatriement.

 

Le 28 janvier, deux jours après les émeutes, le Président est enfin réapparu. Mais on se demande s’il n’est pas toujours dans sa bulle. Devant la presse, il a affirmé que Bernard Kouchner, le ministre des Affaires étrangères français l’a appelé pour lui révéler que Roland Ratsiraka et le général Dolin Rasolosoa sont les responsables des troubles et que la France était prête à aider à l’arrestation de ces deux hommes. Eric Chevallier, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères a précisé que Bernard Kouchner a téléphoné au Président, mais également au Maire Andry Rajoelina, et à l’ancien Maire de Tamatave, Roland Ratsiraka. Le ministre leur a indiqué que « la France tient à maintenir une parfaite impartialité ». C’est une belle manière de faire comprendre que le Président malgache affabule. Marc Ravalomanana recherche le soutien de la France contre le peuple dans la rue. On aura décidément tout vu. C’est 2002 à l’envers !

 

Quant  au Maire, le mandat d’arrêt sur sa tête est toujours d’actualité, ainsi d’ailleurs que ceux concernant son adjoint Nirhy Lanto Andriamahazo et le journaliste Gilbert Raharizatovo.

Aujourd’hui 29 janvier, Antananarivo est déclarée « ville morte » par les dirigeants du mouvement de contestation. Mais avant que cela ne se transforme en mort définitive, Andry Rajaoelina doit absolument se démarquer et avancer dans la recherche d’une solution digne et rapide. Car les émeutes, en particulier dans les provinces, étaient trop bien coordonnées pour être totalement spontanées.

 

Le Président, dans son ego démesuré, se refuse à tout dialogue. Il n’a pas compris qu’il joue sa survie. La rencontre du Maire à Paris avec la diaspora en octobre 2008 a été médiatisée, celle qu’il a eu avec Pierrot Rajaonarivelo beaucoup moins. C’est son droit le plus strict de rencontrer toutes les personnalités qu’il veut mais dans les circonstances actuelles, ses actes doivent être bien posés. Il doit faire preuve de beaucoup d’intelligence, pour ne pas être accusé de faire le jeu des exilés.

 

La formation d’un gouvernement d’union avec des têtes nouvelles issues de ses partisans, comme la société civile, apparaît comme une alternative crédible. Sortir des noms de personnalités ayant frayé plus ou moins avec l’ancien régime serait suicidaire et décrédibiliserait totalement la lutte.

 

Pour l’instant, au programme du Président figure des arrestations, la fermeté ainsi que ses menaces habituelles. Il ne faut donc pas compter sur lui pour trouver une solution. Il a aussi affirmé qu’il avait, « par stratégie », demandé aux forces de l’ordre de ne pas intervenir lundi pour éviter les affrontements. Des officiers, en tout cas, s’étaient engagés à ne pas tirer sur la foule.

 

Quant aux « raiamandreny » (les anciens, ou les figures d’autorité morale) du FFKM (Fédération des Eglises), ils se sont mis sur la touche d’eux-mêmes et leur médiation est de moins en moins souhaitée. L’église protestante est accusée d’avoir vendu son âme en soutenant inconditionnellement  le pouvoir. Quant à son homologue catholique, ses atermoiements ont déçu l’opinion. Le FFKM se trouve dans une situation très délicate et doit prouver qu’il est encore un rempart moral sur lequel les victimes d’une injustice trop criante peuvent compter.

 

Le salut viendra peut-être du peuple seul, c’est-à-dire de l’intérieur du mouvement qui a propulsé Andry Rajoelina à sa place actuelle. De plus en plus de voix s’élèvent pour un gouvernement de transition composé de membres de cette coalition, avec le maintien du Président symboliquement à sa place pour sortir du chaos. Le chef de l’Etat serait ainsi sauvé malgré lui.

 

De toute façon, il n’y a plus le choix. Au dernier décompte, on est à plus de 100 morts. Ca suffit !

 

Alain Rajaonarivony

 

 


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28 janvier 2009 3 28 /01 /janvier /2009 00:04


Ce texte a été soumis à la FFKM (Fédération des Eglises de Madagascar) par des intellectuels rassemblés au sein d'un groupe de réflexion dénommé sauver-mada


Propositions conçues et réalisées par un groupe d’intellectuels soucieux d’apporter leurs contributions à une sortie de crise et au salut de la nation.

 


Face à la gravité de la situation qui prévaut actuellement et devant le risque de voir la crise s’étendre dans les régions et embraser toute l’Ile, nous, groupe d’intellectuels inquiets de la spirale de violence et d’insécurité qui a déjà fait des victimes innocentes , avancent les présentes propositions avant qu’il ne soit trop tard :

1 – Mise en veilleuse des prérogatives du  Président de la République définies par la constitution et suspension de l’assemblée nationale et du sénat.

Le Président de la République reste en place tant en tant que symbole et garant de l’unité nationale. A ce titre, il nomme un premier ministre de consensus doté d’un plein pouvoir pour restaurer l’ordre et la transparence.

2 – Mise en place d’un Gouvernement de Salut Public pour une durée de 12 mois maximum dont le nombre ne dépassera pas les 22 membres.

Le Gouvernement intérimaire sous la direction du Premier Ministre aura pour tâches :
•    Assurer la conduite des affaires nationales et les relations avec l’extérieur en tenant compte des priorités du moment et des engagements internationaux, ;
•    Préparer la mise en place des futurs institutions.

3 – Création par le Gouvernement d’un comité ad-hoc pour la révision de la Constitution et l’élaboration d’un code électoral répondant aux aspirations et aux revendications du peuple pour un Etat respectueux de la démocratie. La composition d’un tel comité doit être représentative des différentes sensibilités et tendances.

4 - Mise en veilleuse des activités des partis politiques jusqu’à la publication du projet de constitution et du code électoral.

5 – Les entités représentatives nationales dont le FFKM, les sociétés civiles et le groupement des opérateurs économiques sont invités à la mise en œuvre de ses propositions.

La contribution des institutions du système des Nations Unies et du Corps Diplomatique présent à Madagascar sont hautement souhaitables..

6 – Appel est lancé à tous les compatriotes soucieux de la cohésion nationale de l’identité et de la fierté malgache pour apporter leur soutien aux présentes propositions car l’avenir radieux de notre pays en dépend.

7 – Pour permettre la tenue d’une première réunion relative à cette proposition, le FFKM est invité à lancer les premières invitations.


Groupe d’intellectuels sauver-mada


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27 janvier 2009 2 27 /01 /janvier /2009 23:26


La journée du 26 janvier restera dans les annales, mais sa nuit aussi. A l’exception de quelques radios qui diffusaient des chants évangéliques, les autres médias d’Antananarivo ont fermé l’antenne les uns après les autres, de gré ou de force. En fin d’après-midi, Radio Antsiva restait seule en lice. C’est sur ses ondes que successivement, le Premier Ministre et le Maire d’Antananarivo ont appelé au calme. Cette bataille sans merci pour la maîtrise de l’opinion (voir article « c’est la guerre : 2 morts lors de l’attaque de MBS ») a fait d’énormes dégâts sur les infrastructures et dans les têtes.

 

Toutes les agences de presse internationales ont annoncé que les manifestants ont incendié une partie de l’immeuble de la RNM (la radio nationale). En fait, il semble qu’une grenade ait éclaté à l'intérieur des bâtiments. C'est donc un militaire qui serait à l'origine du sinistre et non les contestataires. Mais l’annonce était vraisemblable étant donné que partout ailleurs, ça flambait. La lutte politique s’est doublé d’actes de vandalisme qui faisaient penser aux émeutes des ghettos noirs américains. Les exclus se précipitaient pour s’emparer de tout ce qui était symbole de la société de consommation. Des pilleurs se sont rués sur les supermarchés et autres grands magasins.

 

Etrangement, et jusqu’à tard dans la nuit, les forces de l’ordre étaient absentes et c’est le Maire qui est descendu sur le terrain pour aider les pompiers. Quant au Président, il était introuvable. « La-croix.com », édition en ligne du journal catholique La Croix, affirme qu’il est resté cloîtré chez lui toute la journée, sous haute protection. En tout cas, les Malagasy ont attendu vainement ce jour-là un discours à la nation de sa part. Les tananariviens ont vécu une nuit d’angoisse, car le complexe du Zoom étant resté en feu, on a craint un moment que les flammes n’atteignent les dépôts d’hydrocarbures situés de l’autre côté du boulevard, d’autant qu’une rumeur destinée à semer la panique avait été lancée. Des bandes auraient été prêtes à s’attaquer à ces énormes citernes. Cela aurait été suicidaire car tout aurait explosé dans un rayon de plusieurs kilomètres.

 

Ce sont les nerfs à vif que les habitants de la capitale se sont réveillés ce matin du 27 janvier.

Ils ont entendu le Maire leur annoncer, toujours sur Radio Antsiva, que toutes les manifestations étaient suspendues afin de pouvoir distinguer le bon grain de l’ivraie : les manifestants d’un côté, les pillards de l’autre.

 

Et effectivement, plusieurs auditeurs de Radio Antsiva ont annoncé en direct sur les ondes que des jeunes oisifs de leur fokontany (quartier) avait été payé 5.000 Ariary chacun pour participer aux désordres et aux pillages. 25 cadavres ont été découverts dans les décombres d’un centre commercial incendié quand le jour s’est levé. Ces personnes, selon toute vraisemblance des pillards, auraient été surprises par les flammes.

Dans l’après-midi, 5 autres individus ont été abattus par les forces de l’ordre à Behoririka où ils s’apprêtaient à commettre un forfait.

 

La mise à sac des Magro (magasins de gros appartenant au Président) s’est poursuivie toute la journée dans toute l’île : Majunga, Tuléar, Nosy-be… La ville de Sambava est complètement dévastée et les 70 motos destinées aux Maires entreposées là-bas ont aussi changé de mains.

Andry Rajoelina a déclaré qu’il n’était pas question de négociations, contrairement à ce que les médias internationaux ont annoncé, tant que les étudiants arrêtés ne seraient remis en liberté et que les soldats en faction devant MBS responsables de mort d’homme n’étaient pas entre les mains de la justice.

 

Le Président lui aussi a enfin parlé. Les velléités de démission de ses ministres ont été remises au placard. Dans un discours très ambigu où il a promis que « dans peu de temps, il n’y aura plus de pillards, de gêneurs et de manifestants », il a demandé la solidarité des Tananariviens, de « ceux qui se sont sentis trompés »,et appelé les « autres » à réfléchir. Apparemment, cette exhortation ne s’adressait à pas lui-même.

 

En milieu de matinée, Viva Radio a de nouveau émis.

Comme en 2002, la diaspora a été informée en temps réel et tous les sites ont explosé leurs statistiques de visites. Chose étrange, Moov.mg, qui s’autoproclame « premier portail Internet de Madagascar » a très peu parlé des évènements, faisant sa Une sur l’International. Ses forums sont hors-service. Et cet après-midi à Paris, Madagate.com, qui soutient Andry Rajoelina, a été déconnecté du réseau. Joint au téléphone, son responsable Augustin Andriamananoro, estime la panne technique peu probable.

 

Le couvre-feu est décrété de 21 heures à 4 heures du matin.

 

Alain Rajaonarivony



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26 janvier 2009 1 26 /01 /janvier /2009 13:43



Malgré la démonstration de force pacifique de la population descendue sur la place du 13 Mai samedi 24 janvier, le gouvernement a fait la sourde oreille. Et pourtant, plusieurs dizaines de milliers de personnes qui défilent sans incidents, en l’absence de forces de l’ordre, auraient fait réfléchir n’importe quelle autorité ayant une culture républicaine. Mais nous sommes à Madagascar.

 

De retour d’Afrique du Sud d’où il a dû écourter son séjour, le Président a donné des ordres « fermes » pour arrêter Andry Rajoelina le Maire, ainsi que tous les « fauteurs de troubles ». Le Premier ministre n’a pas eu le cran de le raisonner ou de le contredire, car les colères de Ravalomanana font trembler son entourage. Ce dernier ne supporte pas qu’on le contrarie.

 

La voix du peuple a donc compté pour rien, « peanuts ». Vers 3 heures du matin, ce lundi 26 janvier, un commando composé de soldats s’exprimant en anglais a attaqué l’émetteur de Viva Radio à Ambohimitsimbina. Tout Tananarive parle de l’arrivée de mercenaires africains.

 

Les résultats de ce comportement présidentiel sont édifiants.

 

Des barrages d’«Andrim-pokonolona » (comité de vigilance citoyenne) se sont aussitôt érigés dans plusieurs endroits de la ville. Des policiers qui tentaient d’en démanteler un à Ambohipo ont dû s’enfuir. Leur  véhicule a été incendié.

 

Une foule furieuse de ce que l’Etat a fait à Viva Radio s’en est pris aux émetteurs de TVM et RNM, la radio et télévision nationales et ont brûlé une partie des bâtiments. Ces trois médias ont cessé d’émettre. La population s’est aussi dirigée vers le tribunal pour réclamer la libération de trois étudiants arrêtés sans preuves.

 

Les magasins de gros « Magro » appartenant au chef de l’Etat sis à Tanjombato et Antanimena ont été réduits en cendres. Une partie de la flotte de camions de Tiko a été mise à l’abri à Bevalala.

 

La foule a ensuite donné l’assaut aux émetteurs de MBS à Anosipatrana. Les soldats qui défendaient la station présidentielle ont tiré avant de s’enfuir. Ils ont fait 2 morts. MBS a aussi brûlé.

 

A l’heure actuelle, toutes les radios sont muettes à Antananarivo, sauf Radio-Mada qui appartient encore au Président.

 

Les écoles catholiques n’ont pas ouvert et le Lycée Français d’Ambatobe a demandé aux élèves de rentrer chez eux à partir de midi, l’établissement fermant ses portes jusqu’à nouvel ordre.

 

Marc Ravalomanana et le TIM voulaient montrer leur force. Ils sont donc exaucés. D’ors et déjà, les internautes devraient archiver toutes les déclarations des uns et des autres car le sang a coulé et coulera encore. Certains devront en répondre devant le tribunal de l’histoire, sinon devant le tribunal tout court. La population d’Antananarivo est extrêmement déterminée. Andry Rajoelina, leur Maire, a promis de la défendre jusqu’au bout, malgré les forces de l’ordre lancé à ses trousses pour l’arrêter. Il était encore aujourd’hui sur la place du 13 Mai entouré de dizaines de milliers de partisans.

 

Que Didier Ratsiraka utilise les armes en 2002, pour perdurer au pouvoir, c’était ignoble ! Il y avait néanmoins une certaine logique. Il était officier et avait la culture de la confrontation guerrière. Mais que Marc Ravalomanana, chef d’entreprise, vice-président de la FJKM (union des églises protestantes) et affichant un christianisme clinquant, fasse la même chose, il y a là quelque chose qui dépasse l’entendement.

 

Le Président n’a jamais émis un mandat d’arrêt contre son rival. Il a laissé partir Tantely Andrianarivo, Premier-ministre de l’Amiral. Il a même parmi ses collaborateurs, des personnalités qui appartenaient déjà au gouvernement déchu. Par contre, il a fait emprisonner ses compagnons de lutte comme Pety Rakotoniaina et d’autres, et humilié la ville qui l’a fait roi, Antananarivo. Les idéaux de 2002 étaient « Fahamasinana » et « Fahamarinana » (Sainteté et justice). La capitale veut toujours y croire et se bat pour cela.

 

 

Alain Rajaonarivony

 

 

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25 janvier 2009 7 25 /01 /janvier /2009 21:30


La manifestation a commencé au jardin d’Ambohijatovo mais s’est terminée sur la place du 13 Mai. Le correspondant de RFI (Radio France Internationale) parlera d'un symbole. Les chiffres divergent, de 30.000 à 500.000, la vérité étant comme d'habitude entre les deux, sans doute autour de 80.000. Ce qui est certain, c'est qu'il y avait du monde et beaucoup plus que la semaine dernière.


Les déclarations du Préfet déclarant ce rassemblement illégal n’aura donc rien changé. Les Tananariviens ont décidé d’exprimer leur ras-de-bol et leur soutien à leur Maire Andry Rajoelina. Ce dernier, devant le blocage total de la situation, a appelé à la grève générale et s’est déclaré prêt à un éventuel gouvernement de transition. Cette journée du 24 janvier ressemblait étrangement à un mix de 1991 et 2002.


Comme la fois précédente, les politiciens n’ont pas eu droit à la parole. Seul Gilbert Raharizatovo, du FCD (Force de Changement pour la  Démocratie), a adressé un appel aux bailleurs de fonds afin qu’ils ne se rendent pas complice d’un régime pratiquant l’impérialisme intérieur (consistant à se conduire comme des colonisateurs, mais envers leur propre peuple). Un représentant des étudiants a dénoncé les arrestations sans preuves de collègues accusés d’avoir lancé des cocktails molotov. Et des émissaires des régions ont montré à la tribune des extraits d’actes domaniaux témoignant que des tractations sont bien en cours pour céder des centaines de milliers d’hectares à des étrangers, au détriment des natifs. Le Maire finira la réunion par son appel.


Le Président, qui s’est offert une sortie impromptue en Afrique du Sud pendant le week-end avec son nouvel avion pour une réunion de la  SADC (communauté des pays d’Afrique Australe), voulait un accueil triomphal à son retour. Ce dimanche donc, des camions et des bus ont effectué un service de ramassage dans toutes les zones suburbaines, y compris à la sortie des églises pour former des haies d’honneur depuis l’aéroport. Le seul hic fut que la foule criait « TGV, TGV… » (surnom du Maire), et  que cela fut retransmis en direct à la radio.


Dans le même temps, des rumeurs d’arrestation ont couru sur le Maire Andry Rajoelina, l’adjoint-au-maire Nirhy Lanto Andriamahazo et le journaliste Gilbert Raharizatovo, obligeant ces derniers à disparaître le temps de recouper les informations. En fin d’après-midi, les choses semblaient s’être calmées.


Devant l’intransigeance du pouvoir, la population d’Antananarivo va de désobéissance civique en désobéissance civique, portant à bout de bras son Maire. Contrairement à la propagande officielle, le mouvement s’amplifie et commence à s’étendre à toute l’Ile. Une situation identique aurait, dans une nation démocratique, entraîné une inévitable concertation entre les gouvernants et les contestataires afin de trouver un modus vivendi et éviter une crise. Mais l’expression préférée du Président envers ses ministres étant : « Je vous donne l’ordre de… », il est à espérer qu’il n’ait pas la même réaction devant la fronde citoyenne. Pour l’instant, le signe tangible, ce sont des mouvements de troupes vers la capitale. En face d’un peuple qui a toujours fait preuve de pacifisme et de patience, ce n’est certainement pas la réponse adéquate. Une réplique à l’africaine qui serait de faire couler le sang ou de se lancer dans la répression permettrait aux gens du pouvoir d’éviter une remise en cause immédiate. Mais à terme, il sonnera le glas de ce régime car la violence de l’Etat entraînera fatalement une réaction du peuple.


Discrètement mis sous observation par les instances et analystes internationaux, l’Etat passe un test grandeur nature en termes de respect des libertés, des règles républicaines et démocratiques. Pour l’instant, Madagascar a perdu des points dans tous les classements.  



Alain Rajaonarivony


 


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24 janvier 2009 6 24 /01 /janvier /2009 00:01


L’enthousiasme est monté crescendo comme un feu qu’on ne peut maîtriser. Depuis cette soirée mémorable du 20 janvier où Paris était à l’heure de Washington, mes amis et connaissances n’arrêtent pas de s’échanger des coups de fil et des mails exaltés. Congolais, Antillais, Camerounais, Algériens, …. intellectuels ou pas,  tous sont remplis d’un nouvel espoir, parfois encore teinté d’une certaine incrédulité. Et la fièvre n’est pas près de retomber.


Le seul bémol dans cette surexcitation, c’est lorsque j’ai eu un de mes compatriotes au téléphone. Nous sentions bien que nous n’étions pas au diapason de la planète black et métis et au-delà, de tous les hommes de bonne volonté qui voient en l’élection d’Obama la réparation d’une injustice séculaire et la reconnaissance de la dignité du peuple noir. L’humiliation ressentie au pays à cause de l’affaire Daewoo (voir articles précédents), les propos et actes d’un chef d’Etat de moins en moins démocrate, une Constitution réduite à celle d’une république bananière (voir article « révision rapide et chute durable »), il n’y avait en effet pas de quoi pavoiser. Notre pays recule alors que tous les autres avancent.

 

Internet a bien sûr participé à la fête et les posts sur Obama ont fleuri. Les forums de la diaspora malagasy n’ont pas fait exception à la règle et évidemment, les comparaisons entre la situation actuelle de la Grande Ile et celle des Etats-Unis étaient inévitables. Niry, de Sobika.com (un site convivial à recommander), en a fait même un petit édito. Et c’est dans son forum que j’ai déniché une perle. Un internaute a fait un copier-coller d’un bout d'un de mes articles pour déplorer le fait qu’on n’aurait jamais la possibilité d’avoir un Obama à Madagascar à cause de la révision de l’article 46 de la Constitution. Cela a provoqué des réactions des partisans du pouvoir qui viennent maintenant sur Sobika promouvoir leurs idées depuis que leur propre forum officiel a été déserté, les censures et autres insultes y rendant impossibles tout débat.

 

Fidèles à eux-mêmes, la réflexion a démarré par des attaques personnelles n’ayant rien à voir avec le sujet. Mais ce qui est intéressant, c’est l’argument suivant, je cite : «  Enfin, Ra8 a réalisé plus qu'Obama : retour d'un ME.RI.NA au pouvoir !! Et çà, tu le sais pertinement… »

 

Pour ces personnes donc, une des grandes qualités du Président, c’est d’être Mérina. Il est vrai qu’en 2002, on luttait contre la discrimination inverse, où de doctes érudits nous expliquaient dans une théorie fumeuse pourquoi un Mérina ne devait pas accéder à la magistrature suprême, à cause de  la monarchie du siècle dernier. Il y aurait une espèce de compensation que les Mérinas devraient aux Côtiers des générations après. C’était abracadabrant, et surtout un écran de fumée dressé par la Françafrique qui pensait que les Mérina industrieux pouvaient faire échapper Madagascar à leur influence.

 

Et c’est là que se situe le quiproquo, je pense. On ne voulait pas de la discrimination, mais ni dans un sens, ni dans un autre. Un Mérina mauvais est avant tout un mauvais, et le peuple a le droit de lui demander des comptes, tout comme il l’a fait avec Ratsiraka, originaire de l’Est du pays, ou Zafy qui venait du Nord. Et la population d’Antananarivo va prouver dans les semaines à venir qu’elle lutte pour la justice et n’a rien à faire de considérations ethniques.

 

L’arrivée des chefs et rois traditionnels (des « raiamandreny », « Tangalamena » et «Ampanjaka ») venus de toutes les régions de Madagascar, à Antananarivo le 22 janvier pour soutenir le Maire Andry Rajoelina, démontre largement que la population est loin de ces raisonnements racistes.

 

Un autre post était un peu plus constructif car il tentait de démontrer laborieusement que la modification de l’article 46 n’interdisait pas l’arrivée d’un métis à la tête du pays. Mais cet intervenant n’arrive finalement qu’à confirmer ce que j’écris puisqu’au mieux, un métis ne peut postuler à la magistrature suprême qu’au bout de la deuxième génération. Obama a un père kenyan et une mère américaine. C’est un métis, point ! La modification de l’article 46 de la Constitution malgache a crée deux types de citoyens : ceux qui ont les pleins droits et les autres, ce qui est anti-démocratique et discriminatoire. Tout le reste n’est que sophisme.

 

En attendant, ce samedi, les Tananariviens vont de nouveau manifester sur la place de la démocratie à Ambohijatovo, et la diaspora devant l’Ambassade de Paris. Une fois de plus, le pouvoir a réagi par des menaces. Le domicile de l’adjoint-au-maire, Nirhy Lanto Andriamahazo, a été perquisitionné le 22 janvier au matin durant deux heures d’affilé.

Les enquêteurs cherchaient des éléments pouvant compromettre le Maire, armes ou documents, mais sont repartis bredouilles. D’autres collaborateurs du Maire pourraient subir le même sort dans les jours qui viennent. Et des contrôles fiscaux sont prévues le 27 et 28 janvier pour les deux sociétés Injet et Doma Pub, gérées par l’épouse du maire.

 

Les citoyens de province commencent aussi à subir les foudres du pouvoir. Une radio a été fermée à Manakara pour avoir osé parler du meeting d’Ambohijatovo, d’autres à Fianarantsoa et Diego-Suarez ont été fortement invitées à ne plus parler de ce genre d’évènement sous peine de connaître le même sort.

 

Malgré le comportement de plus en plus agressif du gouvernement, la contestation s’amplifie.

Il y a déjà un effet TGV (surnom du Maire) moins spectaculaire certes que l’effet Obama, mais très positif. Le Président s’est de nouveau intéressé au peuple, visité des hôpitaux et des quartiers populaires. Il a promis d’engager un programme pour réhabiliter les infrastructures de santé. Il était temps !

 

En 2002, les Malagasy voulaient forcer le destin. « We have a dream », celui d’une société plus juste où les enfants auraient droit au même avenir.

Maintenant, avec Andry et ses compagnes et compagnons, ils peuvent dire : « Yes, we can ! »

 

 

Alain Rajaonarivony

 

 

 

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