Le 12 mai, en début de soirée, une dépêche de l’AFP tombait pour annoncer que «le chef de la transition à Madagascar, Andry Rajoelina… ne se présenterait pas à l’élection présidentielle». Le lendemain, l’intéressé apportera des précisions et un bémol. Une des pistes de sortie de crise proposée par les médiateurs des Nations Unies (ONU) serait qu’aucun des anciens chefs d’Etat ne puissent postuler au prochain scrutin. Cette clause s’adresse en priorité à Marc Ravalomanana et …Andry Rajoelina car on voit mal Didier Ratsiraka, Albert Zafy ou Norbert Ratsirahonana poser leur candidature étant donné leur âge et leur popularité aléatoire.
Andry Rajoelina serait donc prêt à se sacrifier pour la bonne cause. Le Président «en titre», pour l’instant installé en Afrique du Sud, est réticent. L’idée n’est pourtant pas si saugrenue et mériterait qu’il s’y attarde. Car il pourrait y trouver aussi avantage. Cela lui permettrait de revenir en paix au pays et en négociant intelligemment, de retrouver ses biens. Il revaloriserait son image, en se donnant un air d’homme conciliant, privilégiant l’intérêt de la nation avant le sien propre. Enfin, il n’est pas sûr du tout d’être réélu. Les «légalistes» sont d’abord des anti-Rajoelina avant d’être des pro-Ravalomanana.
Quant au jeune Maire devenu responsable de la Transition, il aurait là une porte de sortie honorable. De toute façon, il ne peut envisager d’accéder au poste suprême dans l’immédiat sans changer l’article 46 de la Constitution qui établit l’âge minimum d’un Président de la République à 40 ans. Or, c’est justement le seul point que personne n’a cherché à retoucher auparavant. S’il s’avise de le réviser en sa faveur, il conforterait l’image du jeune arriviste que ses adversaires donnent de lui. Et de toute façon, participer à une confrontation électorale serait pour lui une aventure incertaine. Il s’est mis à dos Antananarivo sans avoir réussi à rallier les provinces.
Cette solution ouvrirait bien sûr un boulevard à Pierrot Rajaonarivelo, l’ancien vice-Premier ministre revenu d’exil. Mais les jeux sont ouverts et rien n’est gagné d’avance. Même Roindefo Monja, Premier ministre de la HAT (Haute autorité de transition) caresse quelques ambitions et pour se donner des allures d’homme d’Etat, n’hésite pas à agresser verbalement l’Ambassadeur des Etats-Unis. Il n’avait pas besoin de cela pour passer pour un «voyou» et ses qualités diplomatiques ne le prédestinent pas à une autre haute fonction que celle qu’il occupe actuellement, arrachée sur la Place du 13 Mai le 7 février.
D’autres se verraient bien aussi dans le fauteuil de Président : Roland Ratsiraka ou Jean Lahiniriko, déjà présents aux présidentielles de 2006 disposent d’une audience certaine et avaient fait un score honorable dans leurs régions respectives (l’Est et le Sud). Les pressions continuent sans relâche sur la HAT pour qu’elle organise une élection rapidement afin de retrouver une normalité démocratique et républicaine. Le Quai d’Orsay vient de s’aligner sur la position des Etats-Unis demandant un passage aux urnes avant fin 2009.
Pour être sûr de vaincre, il faudra gagner le cœur d’Antananarivo, la carte maîtresse pour une Présidentielle. Il y a déjà pléthore de prétendants et d’autres vont sans doute se déclarer. Madagascar attend la personne intègre et droite qui l'aidera à panser ses plaies.
Alain Rajaonarivony