Le Gasy Tia Tanindrazana (Malagasy patriotes) avait réussi à se faire un nom et à acquérir une certaine crédibilité depuis la prestation de Vony Rambolamanana sur France 24 où elle avait défendu avec brio la thèse légaliste le 27 mars 2009. L’association continuait tranquillement son petit bonhomme de chemin, alternant manifestations et communiqués au grand dam des partisans du coup d’état. Son audience auprès des instances internationales provoquait une gêne considérable au point que la HAT (Haute autorité de transition) a cherché par tous les moyens à l’abattre. Elle l’a accusé en juillet d’être un repaire de terroristes à l’origine des «bombes» découvertes à Antananarivo, sans apporter la moindre preuve (voir article : «la fuite en avant») Cette campagne a tourné alors au fiasco, les allégations devenant par trop ridicules.
Et puis patatras ! une action violente à l’ambassade de Madagascar à Paris le 8 septembre montre une autre facette des légalistes. Un démenti des GTT qui nient être à l’origine de ces actions révèle l’existence d’une dissidence. Un «collectif GTT» serait la branche extrémiste dont Hélian Ralison, ex-premier conseiller viré de l’ambassade par la HAT serait un des investigateurs. L’intervention de la police ce jour là pour mettre fin à l’escalade (au propre comme au figuré), placera ce groupe sous les feux des projecteurs. Cela semblait être le but visé.
Néanmoins, si cette division permet à certains de se propulser en avant, elle affaiblit la capacité de mobilisation des légalistes de la diaspora. Pour les plus anciens, cela rappellera des épisodes de 2002 où les personnes se battant pour la reconnaissance internationale de Ravalomanana, après avoir accompli tout le travail, ont été doublées au moment de la victoire, par des spécialistes de la «lutte des places».
D’après un responsable des GTT historique, cette rupture serait due à l’interprétation des attitudes d’Emile Ratefinanahary dit «Vazaha», directeur du foyer des étudiants malgaches à Paris et un des animateurs du mouvement. Au mois de mai, le forcing de Rinah Rakotomanga pour essayer d’avoir sa place au soleil (voir article : «Y a-t-il un ambassadeur de Madagascar à Paris ?») a provoqué des tensions qui ont dégénéré en affrontements dans l’enceinte de l’Ambassade. La situation était telle qu’Emile «Vazaha» aurait été sollicité pour conclure une trêve avec la partie adverse et trouver un terrain d’entente. Mais après avoir accompli sa mission, il a été accusé par ceux-là même qui l’ont envoyé de trahison et de pactiser avec l’ennemi. En gros, il a été piégé et a joué le rôle du dindon de la farce. Cet épisode permettra de l’éliminer et de laisser la place à ceux dont les ambitions s’accommodaient mal de leur rôle mineur au sein de l’organisation.
Si ce genre de cabales est monnaie courante dans les milieux politiques de la Grande Ile, il ne l’est pas en Europe, où les mots «éthique» et «loyauté» ont un sens. Les simples citoyens, sympathisants du mouvement sont choqués par cet épisode. Des deux côtés, les bonnes volontés cherchent donc à se rapprocher. Finalement, cet épisode ne sera peut-être qu’une péripétie à intégrer plus tard dans la petite histoire des militants, la grande étant le désastre que la Grande Ile vit actuellement. Et si de plus, il permet à celui qui en est à l’origine de devenir ministre, comme on lui en prête le dessein, tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Vony Rambolamanana est, pour sa part, on ne peut plus dans la «légalité». En octobre, à 26 ans, elle va intégrer le barreau parisien. Elle a l’avenir devant elle et tout le temps d’apprendre qu’il ne faut pas faire trempette dans le marigot avec de vieux crocodiles.
Photo : Vony Rambolamanana, lors de la marche organisée à Paris en mai, avec un autre citoyen légaliste
Alain Rajaonarivony